Pourquoi ces éphémères regrets de ce qui a été,
Cette plainte larvée quand s’esquive l’été ?
Pourquoi en ces jours où s’esquisse l’automne,
Toute joie remisée, cœur de suie, ciel atone ?
Cette saison honnie vouée à toutes les partances,
Aux espoirs déteints, aux retours de transhumances,
Je l’entends derrière l’écran de ma vitre mouillée
Qui s’entête à m’appeler de sa chaude voix un peu rouillée...
Que je sorte de la tanière où d’aucuns m’avaient remisé,
Elle m’offre alors son vrai visage, éblouissant et apaisé,
Bien loin des images reçues, en complet décalage
Avec ses bouffées de tristesse, ses prétendus ravages...
Tout frissonnants, des peupliers délicatement sertis d’or,
Tendent un fin réseau où la lumière s’accroche encor.
Derrière eux, quelques feuilles, vêtues de pourpre et de cuivre,
S’envolent à la brise, m’invitant à les suivre.
Ces feuilles mortes qu’autan emporte,
Je les retrouve blotties devant ma porte.
Si j’étais peintre, j’aimerais traduire leurs nuances,
Ne le pouvant, je me console par leur présence
Le ciel où se devine le soir, à tous niveaux,
Porte à l’infini ses strates d’oiseaux.
En V ils s’en vont et leurs vols furtifs,
Saluent mon village, mouvants et plaintifs.
Le soleil va plonger dans un riche couchant
Qui déploie tous ses fastes en un ultime chant.
Une brume éthérée estompe le bord des eaux,
Sur la crête, les bois se découpent, toujours plus beaux.
Bien sûr nous serons promis à des heures d’ennui,
Des villes tout en gris, des jours noyés de pluie.
Mais l’instant même où tout régresse
Ne recèle t-il pas la plus belle promesse ?
Celle du renouveau d’un printemps qui danse
Comme faiblit et se ranime l’indomptable espérance ...