Elle est partie
Elle est partie je n’y crois pas hier encore elle était là dressée comme un poing gris d’audace muette dis
Dis -moi
Dis moi avant l’oubli avant le vide dis-moi le fleuve de sa naissance dans le miel endiablé la blessure incarnate les squames de cendre dis-moi le goutte-à-goutte du soleil sur le fil de l’horizon pêcheur dis-moi
Où
Etait elle avant
Que la terre opilée
Ne déflore ses chairs
Sillons ouverts toison arrachée
Pour la laisser passer
Elle est partie
J’ai entendu ses petits cris
A l’approche des pas
Est-elle
Seulement la tension d’une peau bousculant la mouscaille et repoussant la tourbe au milieu des broussailles est-elle
Partie
Veuve de caresses veuve de voix j’entendais son cœur battre comme le bec d’un poussin va casser la coquille sais-tu qu’elle est partie sais-tu
Quelque part
En son cœur vivait une fileuse tissant chaque seconde et la nuit et le jour et son toit et ses murs et sa peau elle voulait grandir ne pas être rendue au limon aux fossés ne pas être cassée ni même dépolie elle voulait grandir comme toutes les pierres quand on laisse le temps au caillou de se faire rocher et puis dolmen elle voyait plus loin
Loin
Là où s’est effondrée la tristesse du sable qui ne sait le pourquoi le comment et le « là » où les vagues disent en badinant comme on vole un fruit mûr les rivages en croissants où l’on voudrait mourir et n’être plus qu’une ombre elle est partie
La pierre........