Mon chien me fait pitié. Lui, si vigoureux il y a encore quelques mois, se traîne comme un jouet mécanique au ressort cassé. Il fait peine à voir, en arrêt devant le mur, attendant qu’il tombe, qu’il s’efface.
Sa gamelle lui fait peur. Je vous l’assure ! C’est à croire que, dès que je tourne le dos, elle lui saute à la gueule. Mon chien doit penser que le monde lui en veut, mais qu’est-ce que le monde pour un chien qui pète les plombs.
Les chats, ignobles crapules adorées, viennent manger dans sa gamelle sous son nez.
Il y a cinq ans, le chat aurait servi de dessert.
Mon chien perd la mémoire, il perd le sens de l’orientation, il perd ses poils mais ça ce n’est pas d’aujourd’hui, il perd l’appétit. Avant il pissait pour marquer son territoire, maintenant il pisse et marche dedans, dans la cuisine, dans la salle à manger, dans la chambre. Ce n’est pas le pied, surtout quand on le met dedans, horreur !
Aujourd’hui, je me suis mis en tête de le forcer à manger. C’est vrai, quoi ! Il maigrit. Je ne peux tout de même pas le laisser crever de faim.
Il est là, abruti, un morceau de viande dans la gueule. L’air absent. Même chez un chien, ça fait drôle. Je crois qu’il oublie ce qu’il doit commander comme muscles pour mastiquer.
Merde, il est vingt heures, on ne va pas y passer la nuit.
J’ai dû voir trop grand, j’ai les yeux plus grands que son ventre.
Bon, je veux bien congeler le torse et les bras, mais faut absolument qu’il termine la cuisse.
Et la tête ! Alouette.