Je m’appelle Léon VINCENT,
Autant répondre aux questions qui vous envahissent : non, je ne suis pas le fils de David, ni un ‘visiteur’ d’ailleurs. "Les envahisseurs. Ces êtres étranges venus d’une autre planète. Leur destination : la Terre. Leur but : en faire leur univers. David Vincent les a vus. Pour lui, tout a commencé par une nuit sombre, le long d’une route solitaire de campagne, alors qu’il cherchait un raccourci qu’il ne trouva jamais".
Par contre vous pourrez dire à vos petits enfants, "j’ai rencontré un être étrange, né de rien mais fourrant son nez partout..., un être solitaire qui cherchait ce que personne, jamais, ne trouvera...".
Je suis né ce 2 mai 2019, cinq cent ans après ma mort, hier je n’étais rien, mais grâce au ’génétron’, inventé par le Docteur Brénard Zinbla, arrière, arrière, vade retro, arrière, p’tit p’tit fillot, d’un savant génial de mon époque, un autre visionnaire tombé dans l’oubli suite à une chute dans un trou normand : Bernardus Blazinus (d’où le mélange du patronyme retenu par l’histoire qui fait preuve ici d’une bien courte mémoire et d’un grand manque de considération pour celui qui fut, faut-il le rappeler, l’inventeur d’un encrier en plume, idéal pour voyager léger et teindre les chemises).
Donc, grâce au génétron, dont le développement s’est enfin terminé après 500 ans de recherches et de développement, il n’a pas fallu vingt-quatre heures pour m’éclore et m’instruire. Je sais tout de vous, qu’on se le dise, tout de l’histoire et franchement y a pas de quoi la ramener !
D’où viens et où vais-je ? J’entends déjà vos cerveaux torturés de curiosité bouillonner comme le pet lâché par le ventre de la terre dans un marigot (comme quoi je sais choisir mes mots, j’aurais choisi ’grand mère’ & ‘baignoire’ et l’image aurait eu un autre bouquet, non ?).
Pour ne pas faire durer inutilement le suspens, sachez que l’on m’a créé à partir d’un cheveu trouvé collé sur un tableau de maître, ‘du’ maître pour être précis, Leonardo di ser Piero da Vinci ce qui signifie le "fils de maître Piero, de Vinci".
Déjà hybride et illégitime, marqué par le destin dès sa naissance dans le petit village toscan d’Anchiano. Est-ce ce statut de bâtard qui lui a donné la volonté farouche de devenir une des plus grande figure de tous les temps ? Ou est-ce l’amour de sa maman, Catarina, humble paysanne, séduite par ce notable notaire aux intentions baladeuses ?
Ne fût-il pas, simplement, le plus curieux et le plus passionné de tous ?
Au grand dam de son rival de toujours, Bernardus Blazinus de Thiercélius, un village situé à l’époque en Auvergne, preuve incontestable, s’il en fallait, de l’esprit farceur de la tectonique des plaques...
L’histoire qui a horreur de cela, ne le répètera pas, mais nos deux compères, à l’instar plus tard de Darwin et Lamarck, se livrèrent d’interminables joutes verbales (non télévisées malheureusement et les peintures retrouvées sont forcément moins parlantes), sur les méthodologies scientifiques : Bernardus cherchant la vérité dans le raisonnement logique et non dans l’aveuglément frénétique de la passion, comme "ce possédé de Léo" (sic).
Aux dernières nouvelles, son descendant, Brénard, remet la méthodologie de son aïeul en question, interrogation qu’il n’hésite d’ailleurs pas à adresser à ses potes, juste pour les taquiner, de préférence en été, lorsqu’ils n’aspirent qu’à une seule chose : avoir enfin le temps d’assouvir leur passion, la sieste à l’ombre d’un figuier...
Je suis né le 25 mai,
recréé à partir d’un de "mes" poils,
retrouvé sur une vielle toile.
Cela aurait été un poil de pinceau,
j’aurais pu être blaireau ou pourceau.
Je préfère penser qu’il s’agit d’un cheveux,
et non d’un autre système pileux,
pour qu’on me traite de "tête de nœud" ?!
Non mais !
Dans un laboratoire près du lac Huron, un établissement sophistiqué datant de la réunification, de l’époque dite du "Monde de l’Un" (pour les amateurs d’herbes tropicales, voir "mission impossible" de l’historien ‘Jean Marin’, un des rares exemplaires existant est conservé à la bibliothèque du musée des civilisations, dans les archives du petit 20e, ed. Laplum).
Dans le laboratoire rutilant, ’Le Professeur’ m’a donné vie, le docteur Zinbla m’a ensuite injecté la micropuce biodégradable, la mémoire qui allait conditionner (ou détruire ?) ma vie. Moment d’appréhension à ce moment là, je vous l’avoue humblement... Chacun, "L’Un", compris (et non l’incompris, vous suivez encore ?), espérant que je puisse accéder au génie de Léonardo.
Très vite, 3 secondes deux dixième, je compris qu’il n’y aurait rien à faire, ce que d’autres n’avaient pas inventé, je l’avais fait, j’avais tout compris, tout dessiné, disséqué, décrit, dépeint et peint, tout mangé, tout bu, la peau du ventre bien tendue, merci petit jésus (oui, le saucisson et le rhinocéros itou, avec un chandelier, dans la pendule).
Des inventions servant le bien comme le mal, comme si je n’avais (je parle de "lui") jamais pu choisir entre l’ombre et la lumière (encore un reproche de Mona Lisa !).
Dérouté, à en écrire à l’envers pour un monde qui ne file pas droit, qui ne tourne pas rond non plus d’ailleurs... Un monde qui sert l’hypocrisie sur glaçon à l’heure de l’apéro, un monde qui sert le pouvoir, l’illusion, la politique et la cupidité de l’homme, un monde qui mérite mieux que les hommes, mais qui s’en fout, parce que le monde, lui, est généreux...
To do list :
Un projecteur, fait ; un treuil avec vis sans fin, fait ; un cric à crémaillère, fait ; une vis sans fin pour le pompage de l’eau, fait ; des poulies multiples, fait ; un anémomètre, fait ; un hygromètre, fait ; un podomètre, fait ; une butée à billes, fait ; un crochet libérant automatiquement une charge à son arrivée, fait ; une clef articulée, fait ; un marteau pilon, fait ; une grande échelle autoélévatrice, fait ; un bateau à aubes, fait ; un sous-marin pour DELPHINE, fait ; un profil d’aile, fait ; un hélicoptère, fait ; un parachute, fait (prudent avec le précédent) ;
(ouf, je souffle).
Un canon à vapeur, fait ; une bombarde chargée par la culasse, une catapulte, des arquebuses, des balistes, une bombarde sans effet de recul, une mitrailleuse, fait, fait, fait, fait, fait...
Et pour ces dernières, il n’y a vraiment pas de quoi être fier ! Je vous en demande bien pardon... un peu tard je sais, mais comprenez moi... était-ce "moi" ou "moi" ? Suis-je responsable d’une autre époque ?
Léo, permet-moi de t’appeler comme le faisait maman, et puis ne partageons nous pas la même ‘gêne’ ? Léo, je suis ton fils et ton frère, je suis toi ressuscité, ma vie ne tient qu’à un cheveu... Ou, à voir ce qu’ils ont fait de ce que nous avons fait, ...un poil de cul ?
Léo, qu’as-tu fais ? Que nous as-tu laissé ?
Il ne reste rien à peindre, rien à disséquer, rien à découvrir mieux que tu ne l’ais fait, rien à construire, rien à trouver, rien à détruire, les zommes s’en sont chargé avec délectation et gloutonnerie, semble-t-il...
La seule chose à laquelle tu ne t’es pas attaqué... Cruel cadeau que tu me fais, avoues, vieux voyeur illuminé, clairvoyant visionnaire, toi le savant sachant qui a tout légué à la postérité, toi qui as façonné mon propre destin, je te soupçonne de l’avoir su...
D’avoir su qu’il n’y a, aujourd’hui, plus rien à faire...
Plus rien, qui ne soit utile, que du futile, du superflu pour des superfloués.
Rien...
Sauf, peut être, l’amour sur terre ?
Est-ce la ma mission ?
Heuuuuu.... où est mon « joker » ?
Aux portes du ciel, sur une plage d’Ibiza, pas loin de l’ébénisterie, nous sommes là, quatre doux rêveurs, prenant l’apéro au bar de la plume, nos amis arriveront bientôt pour se joindre à nous, nous parlerons de l’amour, de la vie, de la mort, de la paix, des conditions pour un monde plus beau... et nous coucherons tout cela en vrac, dans un délire orgiaque, sur du papier vélin, pour la postérité et quelques illuminés...
Au fond, vous aviez vu juste, Docteur Zinbla, la raison du plus fort ne peut vaincre la passion des rêveurs, jamais, jamais...