C’était dans un autre lieu, je ne cesse de tenter de me souvenir.
Etait-ce dans le grand Est désolé soumis aux colères des vents froids et des vapeurs diaphanes ou alors caché dans le ventre de montagnes aux aiguilles acérées.
Je me suis égaré dans ma mémoire.
Je me souviens simplement de cette grande étendue neigeuse, d’enfants heureux, de ce contentement exemplaire d’un vieillard très sage, notre transmetteur de savoir.
Une nuit cependant me semble t’il, de grands hommes noirs sont venus en traîneaux à chiens. Ils avaient traversé la grande forêt, armés de sabres et de lances.
La lune s’est voilée derrière de tristes nuages gris.
J’entendis leurs clameurs de haine et de cruauté entrecoupés par le son des lames frappant d’amers victimes.
Alors la neige est devenue écarlate. Au loin je distinguais notre chef allongé sur le sol, dépecé comme un simple animal.
Le monde entier était-il en train de s ‘écrouler ?
Fallait-il ainsi frapper notre colonie, sans un seul ultimatum ?
A cet instant ma mémoire s’évanouit.
Aujourd’hui c’est encore l’hiver, une averse fait luire le macadam de la capitale.
Autour du cou d’une femme fortunée je suis étole de fourrure, un simple accessoire.
Je me souviens maintenant !