Le patriarche, dernier vivant d’un coin tranquille, est assis dehors. Il garnit sa pipe de tabac blond, l’allume, et la fume sereinement...
Pas de vent, pas de pluie non plus, aucune chance de trouver des champignons pour les vendre au marché. L’été refuse de partir cette année et l’automne s’impatiente. Avec la fierté qui le caractérise, il va se fâcher et nous envoyer une tempête de tous les diables. Les arbres vont souffrir en voyant leurs branches se courber. Les feuilles n’auront pas le temps de se changer et mourront allongées sur le sol se dit-il .
Pépé comme on l’appelle si gentiment au village, ne pourra pas sortir de chez lui pendant trois jours, le vent infernal l’en empêchera , il le sait, il le sent tout comme cette essence si douce des sous-bois qui se prolonge jusqu’à lui...
Le vieil homme entre et prend sa lanterne qu’il va suspendre comme tous les soirs au fronton de sa maison. Gardienne, elle protège les derniers aventuriers de ce chemin perdu dans la campagne... Bientôt, ce sera fini, elle s’étendra avec lui. Il est temps pour lui de mettre tout en ordre dans sa maison et dans ses pensées ... Il n’a plus qu’un désir ce soir : partir sans souffrir sans penser. Il aimerait que les vents d’ automne l’emportent bien loin de tout ... Il a vu tant de choses, affonter tant de misères, aimer tant de femmes qui ont disparu... Il ne regrette rien mais il est fatigué par la solitude qui le poursuit depuis trop de temps. Si tout va bien, le quatrième jour, il sera parti retrouver ses "bonheurs"...