Au secrétariat de la direction du personnel, ils m’avaient tous pris le chou , aujourd’hui !
Toute l’équipe s’était liguée pour sortir des cartons une vieille revendication au sujet de l’horloge du vestibule.
Certains réclamaient de la reléguer au placard sans autre forme de procès.
Un groupuscule plus iconoclaste déposa une pétition pour la voir brûler sur le parking de l’entreprise.
Les plus anciens de la maison – ceux surnommés « les grognards » -, sans doute par nostalgie de leurs années de jeunesse, proposèrent une solution modérée : mettre en vente la belle comtoise et offrir les fonds au comité des œuvres sociales.
Un peu à l’écart, le veilleur de nuit ne pipait mot.
Il fixait l’horloge.
Son regard rempli de lunes, de spoutniks et d’étoiles filantes, il se retourna vers nous et balbutia quelques mots incompréhensibles.
Le chef du personnel n’en pouvait plus et s’écria hors de lui « on ne va pas continuer à jouer au chat et à la souris ! parlez plus fort Bastien ! qu’avez vous à nous dire ? et qu’on en finisse avec cette histoire ! »
Bastien, avec une fougue que personne ne lui connaissait, déclama :
« il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Et, ces nuits-là, je suis dans l’ombre comme un mort.
l’horloge, mon amie, sonne les quarts, les heures
et à chaque demie me fait croire au bonheur »