Mercedes avait rempli l’évier avec de l’eau très chaude, trois gouttes de liquide vaisselle rose "parfum des îles". Elle prit une fourchette et se mit à fouetter l’eau de tous ses forces .. Pourquoi ? elle l’ignore encore.. C’était pourtant un jour comme un autre, un énième jour de travail dans cette maison de maître occupée par un couple de retraités carthaginois. Ils avaient une fortune colossale, ayant su jouer de la calculette, mais ne refusaient d’acheter un lave-vaisselle.
Dans le jardin - le parc serait plus juste - un enclos était réservé aux alligators, un autre bassin grouillait de piranhas, et dans la clairière du bois séjournait une meute de loups .
Sur la terrasse ensoleillée, Madame baillait, un roman ouvert à la première page posé sur la table à côté du hamac. Monsieur, lui, s’était installé dans le fauteuil d’osier sous la tonnelle. Tout était calme.
Mercedes fouettait, fouettait.
Les bulles de savon grossissaient et s’envolaient par la fenêtre. Géantes.
Mercedes fouettait sans relâche.
Les bulles envahirent la cuisine, la terrasse, recouvrirent la tonnelle, avalèrent le bois, engloutirent les bassins, et tout disparut soudain.
Certains soirs on entend encore le rire de Mercedes.
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Il fait si froid
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