Cher Ami,
en lisant "Je suis venu, j’ai vu, j’ai vécu"... chacun aura, et c’est bien ainsi, son interprétation.. Voici la mienne.
En te lisant, l’image qui me saute aux yeux est celle du "yin et du yang". L’opposition et la complémentarité.. courir sa vie sans prendre le temps, tout simplement, de "contempler", de se recueillir, de tirer les leçons de vie... de sa vie...
Et déjà apprendre à ne pas vivre égoïstement, hors de l’univers, mais intégré à lui...
Ton texte m’évoque toute la relativité de nos vies, (des choses qui nous entourent, de nos chimères) dans un équilibre précaire, dans un mouvement qui pousse à l’immobilisme.
Oui, c’est ça.. une balance immobile, un état quasi anormal, mais indispensable... un état en permanence instable entre "soi" et "soi" : celui qu’on veut être et celui qu’on n’est (qu’on naît)..
Et si l’on pousse ce jeu, on a :
"Comme je crois que je suis" et "comme je crois que les autres me voient" qui sont des miroirs subjectifs que l’on se fabrique selon son humeur.
Il y a également : "comme les autres me voient" = miroir à la fois subjectif (leur regard) et objectif (leur feedback, dont on tient inévitablement compte),
il y a également "comme je voudrais qu’ils me voient" et c’est ce qui va, trop souvent, conditionner notre comportement...
La seule vérité absolue est que le "qui je suis" est une réalité qui nous est inaccessible !
On se ’perçoit’ au travers de tant de filtres et trop souvent au travers du regard de l’autre dont on a, faut le reconnaître, bien du mal à se défaire...
A en devenir schizo.. non ?
Le yin et le yang, cercle magique et infernal, apprendre à prendre du recul sur ’la vie’, entrer dans une vision plus fusionnelle et plus ‘cosmique’ (comique, ça..), se détacher du ’matériel’..
Mais là, ami Heaven, ..faut pas trop rêver... c’est tellement difficile..!
Revenons à "l’équilibre" : un état fragile entre nos doutes et nos convictions, nos colères et la tendresse, perdus entre nos rêves, ceux là même qui nous fabriquent une bien surprenante réalité, parfois. Une douce illusion qui nous fait fermer les yeux sur les aspects mesquins de nos vies pour ne regarder que ce qui nous réconforte.. douce illusion qui nous fait passer à côté de vérités bien plus importantes...
Difficile disais-je ? Difficile également d’accepter une telle remise en cause des illusions qu’on se fabrique pour rendre nos vies plus... vivables...
Quelles capacités introspectives et quelle sagesse faut-il pour accepter le charivari, le chaos du cœur et de l’esprit...? Défendre tout et son contraire, croire tout et son contraire, espérer tout et se rendre compte que "tout" n’est "rien".. ..si l’on passe à côté de soi..(sans se voir ?)
Devenir maître de son "destin", devenir son propre auteur, accepter les contraintes et les règles, pas les obligations ou la manipulation du regard vitreux et convoiteur de son voisin..
Dur métier de funambule, avoues..!
Prendre conscience du terrible poids des mots (et là le psy que je suis pourrait faire une dissertation de 10 pages sur le sujet). Tenez par exemple, cet enfant, son père lui dit des horreurs (les mots, croit-il, laissent moins de traces que les coups..).. et cet enfant imagine que son père sait ce qu’il dit et fait, il l’aime.
Il ne sait pas que pendant 10, 20, 30, 40 ans.. jusqu’à la mort.. ces mots là vont conditionner sa vie.. Oh ! il les aura oubliés, pour ne pas en souffrir.. l’inconscient pas..
N’avez-vous jamais vécu cette curieuse expérience d’entendre des mots qui semble surgir du passé ?
Ces mots qu’on dit à d’autres, ceux qu’on n’ose dire aussi, ceux qu’on se masque pour éviter le poids de regrets ou de remords alors que c’est précisément dans ces états critiques ou dans le spleen, que "la leçon" se planque...
Se boucher les oreilles et remordre dans les aspects futiles et superficiels, mais si ‘confortables’, de sa vie, chercher à s’imposer aux autres pour l’illusion d’exister au sein du troupeau, de partager sa propre solitude avec d’autres solitudes, pas dans la recherche de complémentarité ou de communion... juste pour échapper au terrible sentiment de vide...
Illusion oui ! Alors qu’on peut également être bien, en paix avec soi.. ..pour peu que l’on s’accepte soi.. (ou alors, bien entendu s’engager dans des relations reposant sur de vraies valeurs d’écoute et de solidarité, par exemple).
Mais quoi ?
Faut-il accepter que le retour à l’émerveillement n’est qu’un mensonge furieux ?
Je ne puis, moi, m’y résoudre !
Oui, comme tu le précises si justement, le salut dans l’élévation ou la chute, indispensable montagne d’a priori et de clichés à franchir, de conditionnement et de verrous intellectuels à lever.. ou d’abysses à atteindre pour enfin se libérer d’un coup de pied sur le fond du fond, en plein dans l’inutile..
Se perdre dans le cœur et l’esprit, dans le cœur surtout (pour moi en tout cas), ..se perdre pour se retrouver, j’adore cette phrase là, moi qui doute de tout, de moi surtout, mais effectivement c’est dans ce doute que les bons choix, je crois, se font. L’orgueil et l’arrogance rendent aveugle et sourd. Il faut certes un minimum d’ambition (personnelle, de développement, pas d’accaparement) pour avancer, le doute et l’humilité me permettent, sans doute, de moins me tromper..
"Ma vie s’adresse à moi", je ne suis un exemple pour personne ! Le suis-je au moins pour moi si je continue à courir (fuir quoi ?) de la sorte..?
Quelle belle question qui nous renvoie face à notre propre miroir...
Merci, merci, merci !
Je pars plein d’entrain, méditer sur le "cercle magique" du yin et du yang.. Gare aux importuns, ce soir sur le grand ring deux champions vont s’affronter : moi & moi !
Tu ne sais pas quoi ? Je crois que je doute..
Tu vois, j’osais pas t’en parler, j’essayais de me raisonner, mais y a pas moyen..
Alors bon, ça y est, je doute, c’est super !
Je doute comme un fou,
je m’éclate dans la circonspection,
l’orgie introspective, la partouze nihiliste...
Je doute ! M*#de, y a pas à hésiter !
Je te préviens dès que je me suis retrouvé là ou mon "vrai" s’accouplera à mon "imagé" (en espérant que ce soit bien moi..je suis encore capable de me surprendre.. hihi, désolé, besoin de sourire après cette longue réflexion..)
Amicalement,
un lecteur assidu et impressionné ! si, si !
Papabul