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Soirée hivernale ; scène classique. Le père au volant, la mère à la carte, et sur la banquette arrière, assise en diagonale, une petite fille emmitouflée dans son manteau, un bonnet blanc, des gants multicolores aux mains, et une sacoche contenant de l’eau, des biscuits et des médicaments. Tout ça, oui.. Pourquoi ?
Elle est malade. Je ne sais pas de quoi, je ne m’y connais pas en maladies tueuses.. Mais elle est fatiguée.. C’est tout ce que je sais. Ils l’emmènent à l’hôpital, je ne sais pas non plus pourquoi, peut-être pour qu’elle y pousse son dernier soupir, qu’ils soient apaisés car ils l’ont suivie jusqu’au bout. Peut-être pour tenter de la faire survivre quelques mois de plus .. ; Elle est si jeune, après tout, délicate comme une aile de papillon sur laquelle on n’ose poser son doigt graisseux. Parents en détresse.
A l’arrière, pourtant, elle n’est pas si malheureuse.
Ses yeux s’animent d’espoir, pour brûler les quelques flots de larmes qui s’écoulent..
Et là, un homme apparaît. Il est sans âge, vêtu de blanc, tendrement lumineux, et son visage.. son visage.. Est celui qu’elle voulait voir ; elle ne l’avait jamais imaginé, ni même croisé en rêve, mais depuis tant de maigres années elle.. elle le voulait !
Il la regarde en souriant. Elle lui sourit aussi, peu surprise. Elle sait qui c’est, et ne veut pas affoler ses parents, qui sont déjà bien angoissés et pressés par le temps.
« - Que désires-tu ?
Savoir.. votre nom.
Je n’en ai pas. J’ai celui que tu veux.
May, en masculin, ça existe ?
C’est ton prénom ? Je ne sais pas.. C’est joli, tu sais.
Oui, je suis May. Tu seras Mayd’homme alors. Comme le « petit d’homme » dans le livre de la jungle.
D’accord.
Un temps. Ils se regardent. Elle n’a pas peur.
Mayd’homme…
Oui ?
J’ai soif .
Ton eau est dans ta sacoche ? Attends. »
Il l’ouvre et sert à boire à la petite. Elle observe ses parents qui sont concentrés sur la route.
« - Ils se doutent de quelque chose ?
Non.. Je ne peux t’expliquer. May…
Oui.. ?
Il va être temps d’y aller. Tu as cinq mots. »
Il s’en alla avant qu’elle ne puisse terminer de le questionner.