Tu ne sais plus quoi penser. Tu es perdue. Tu ne comprends pas cet abandon. Tu essaies pourtant de toutes tes forces de te raccrocher à une explication possible mais tu n’en trouves pas. Tu poses l’équation, encore et encore, dans tous les sens, mais tu aboutis toujours au même refrain, lancinant, insupportable : tu ne comprends pas, c’est injuste, tu ne comprends pas, c’est injuste, tu ne comprends pas, c’est injuste...Alors un soir, tu ne veux plus l’entendre, tu veux que cela s’arrête, tu lui écris ces mots :
" Mon amour,
Je me sens sombrer dans la folie. J’ai le sentiment que je ne viendrai pas à bout de cet amour. je ne guérirai pas. Je commence à entendre des voix et je n’arrive plus à me concentrer. Aussi vais-je faire ce qu’il me semble la meilleure chose à faire.
Tu m’as offert le plus grand bonheur possible. Tu as été pour moi ce que personne n’aurait pu être. Je sais que je gâche ma vie et qu’à cause de moi une vie a été gâchée.
Tout m’a quittée, excepté la certitude de cet amour. Je ne peux pas continuer.
Je ne crois pas que deux personnes auraient pu être plus heureuses que nous l’avons été..."
Tu perds la tête. Cette lettre, tu la déchires aussitôt. Quelques vers d’Aragon illuminent cet instant que tu ne veux plus jamais revivre :
" Moi du moins je crierai cet amour que je dis Dans la nuit on voit mieux les fleurs de l’incendie Je crierai je crierai dans la ville qui brûle A faire chavirer des toits les somnambules Je crierai mon amour comme le matin tôt Le rémouleur passant chantant couteaux couteaux Je crierai je crierai mes yeux que j’aime où êtes-Vous où es-tu mon alouette ma mouette Je crierai je crierai plus fort que les obus Que ceux qui sont blessés et que ceux qui ont bu Je crierai je crierai ta lèvre est le verre où J’ai bu le long amour ainsi que du vin rouge
Le lierre de tes bras à ce monde me lie Je ne peux pas mourir celui qui meurt oublie"