On dit qu’entendre est passif, on est entouré de bruits qu’on finit par ne plus entendre.
Ecouter est actif. En néerlandais le mot "verbe" se dit "werkwoord" : werk = travail woord = mot... Belle définition du verbe, non ? Le mot qui travaille...
Entendre serait donc passif, mais si on lui ajoute un tout petit rien, un "s", par exemple, comme cela devient compliqué parfois...
On ne peut s’entendre sans s’écouter, c’est évident même si ce n’est pas toujours évident de se comprendre, mais sans se voir ?
Dans notre îlot privilégié, dans cet encrier peuplé de plumes de bonnes volontés, on peut s’entendre sans s’écouter et sans se voir.
Mais pas sans se lire... et on lit avec les yeux, on ne se voit pas mais on se découvre, est-ce illusion de croire que nous laissons tous des bouts de nous dans nos textes ?
Mais pour les découvrir il faut autre chose que des yeux... il faut du cœur, comme le faisait dire Saint Ex au Petit Prince "on ne voit bien qu’avec le cœur". Est-ce à dire que Saint Ex était trop fier (ou trop fainéant ? ) que pour nous parler ?
Non, il pensait que pour être entendu il fallait écrire... alors il parlait à sa manière, avec les mains...
On l’aura compris, on est déjà bien loin du pictogramme de l’oreille que l’on trouve dans les livres d’enfants ou sur internet indiquant par là qu’il y a une illustration sonore ou un commentaire...
Ainsi donc, si l’on croit ce qu’on lit, on pourrait s’entendre sans s’écouter, mais comment le faire sans se mettre d’accord ? Et si je me confie à vous, lecteurs anonymes, qui me dit que vous comprendrez ou que vous aurez envie d’en faire l’effort ? (La question ne se pose pas pour celui qui ne me lit pas... mais que je suis prêt à écouter...).
Ecouter, entendre, se comprendre tout ça demande donc de la volonté et implique tous les sens. Si tu ‘vois’ ou ‘sens’ ce que je veux dire...
Quand on se parle, regarde-t-on les yeux ou la bouche qui prononce les mots ?
Le regard est nécessairement mobile, gardant l’image globale du visage (mais aussi de la posture générale), puis se fixant sur le front, les yeux, la bouche,... En définitive, ce sont les signaux non-verbaux qui vont, ou non, valider les mots prononcés.
L’ennui pour le porteur de lunette distrait que je suis est que, si je ne les ai sur le nez, je risque fort de louper une partie importante de l’information, dévoilée souvent inconsciemment par les mimiques... (Et lorsque je dis ‘sur le nez’ n’allez pas croire que je vois avec mes narines... n’en profitez pas d’être caché sous ce doudou en plume pour vous moquer en plus !).
Les yeux nous aident à entendre mieux, ou à communiquer si l’on est malheureusement mal entendant (langage des signes, lecture labiale). Et quand vous les gonflez de vos verbiages gesticulants, ils se détournent, les yeux...
N’avez-vous pas remarqué que quand il y a une annonce au micro dans un lieu public les regards se tournent vers les baffles, comme si le fait de regarder un gros caisson noir allait nous aider ? Rien à voir avec le caisson mais nos yeux agissent comme des guides, le regard dirige notre attention, concentre nos récepteurs, nos oreilles…. Tiens à propos, les porteurs de lunettes sont ils avantagés dès lors que les branches trop courtes en font des pavillons d’éléphants ?
Tout ceci s’explique mais lorsque nous entendons les gargouillis ou les borborygmes de notre corps, que dit-on ? Entendre, écouter ou ressentir ? Et cette jeune fille qui entendait des voix... fallait-il pour cela la brûler ?
Alors voilà, indépendamment du fait que je ne sais pas, vous m’entendez, où me mène cette démonstration décousue, je suppose que nous avons maintenant conscience qu’entendre et écouter ne se résume pas à une question de pavillon et je n’ai pas l’intention de refrapper l’enclume avec le marteau pour vous convaincre de mettre le pied à l’étrier de cette démonstration par l’absurde que la veille d’une opération n’est pas propice à la méditation...
Entendre et écouter, une affaire de sens, de générosité également.
Et qui dit sens dit perception et qui dit perception dit filtres, "nos sens nous trompent" comme disait mon oncle Eustache, "tu comprends, la réalité n’existe pas, nous n’en avons qu’une représentation qui passe par la manière dont notre cerveau va triturer l’information, tu suis petit limaçon" ?
Une même information va être perçue différemment par chacun, question de compréhension, de culture, d’éducation, d’état d’esprit, d’humeur aussi...
Alors... voyez-vous, pour s’entendre... rien n’est gagné..!
Là on parle de ce qu’on entend, mais quelle influence ont les sons que nous n’entendons pas ou les couleurs que nous ne voyons pas toutes ces infra ou ultra fréquences en quoi influencent-elles nos vies, nos sens mêmes.. il en est de même pour certaines odeurs, mais là paraît qu’il vaut mieux pas toujours creuser...
Bon je me perds là...
Et puis je dois y aller...
C’est entendu ?
On se voit et on en reparle ?