A ma dernière visite, elle arborait ce masque aux traits sombres et tirés, et il y eut ce rictus esquissé lorsqu’elle ferma la porte, après m’avoir saluée...
Mouvement de tête poli. Sourire forcé. C’est l’image que je garde, comme un ultime rappel de tout ce temps passé à écouter sa peine, l’encourager à vivre, oublier le passé.
Sourire douceur.
Durant bien des années, j’ai tenté de l’aider à chasser ce cafard, immonde bête vile qui lui suçait la tête.
Sourire de fête.
J’avais mis mes amis, mes affaires de côté, pour être disponible toujours et sans compter. Je lui disais souvent : "- t’inquiète, ça va aller !".
Sourire tendresse. Patience. Témérité.
Mais rien n’y fit, rien n’y ferait... Ni la tendresse, ni les fleurs, ni les douceurs sucrées, salées. Ni la beauté fragile des moments partagés. Toujours elle retombait...
Puis, ce fut l’extravagance de cette "mort" simulée à base d’alcool-cachets... En l’emmenant aux urgences, je pleurai et caressai son front, tandis qu’elle maugréait : "Tu sais toi ??? He ben, je te hais !".
Délire alcoolisé. Fond de vérité ? Sourire gêné.
Cloîtrée dans son glacial silence, où j’avais eu coutume d’aller la rechercher, elle n’a pas répondu à mes derniers courriers. Je n’ai pas insisté, j’avais tout essayé.
... Plus tard, j’appris qu’elle agissait dans l’ombre pour tenter de me nuire de bien vilaine manière.
J’ai de la peine pour elle, mais n’ai aucun regret. Car je revois ce sourire d’enfant, entreaperçu parfois, lorsqu’elle fut sincère. Du moins je crois, enfin j’espère.
Alors, à cet instant encore, je souris.
On ne se refait pas.