Dans les rochers d’une eau profonde
Des crevettes batifolaient
Elles jouaient à faire la ronde
Autour d’un corail dentelé.
Un crabe blanc qui là passait
Leur dit « mesdames s’il vous plait
Puis-je m’associer à vos jeux ?
Je suis tout seul, et malheureux. »
La plus jolie de ces coquines
D’un œil malin lui fit la guigne
« Monsieur le crabe lui dit-elle
arrêtez de chercher querelle,
quand vous saurez marcher bien droit
vous pourrez jouer avec moi »
Le crabe bien sincèrement
Répondit sans discernement
« mais je n’ai jamais su marcher
autrement que tout de côté,
alors si vous pouvez m’aider
à aller droit, sûr ! j’apprendrai »
Mais les crevettes ne furent sages
Et s’amusèrent de l’intrus
Qui bien qu’armé de grand courage
A aller droit jamais ne su.
Et il finit par prendre rage
Et renoncer, c’était couru !
Alors il dit aux demoiselles
Sans sourciller : « vous vous moquez
Mais dîtes moi qui est parfait
Ni vous ni moi n’avons eu d’ailes
Comme les oiseaux pour voler
Car ici bas rien n’est parfait ».
Depuis ce jour bien des crevettes
Par le Goéland ou la mouette
Se font croquer mal à propos
Car elles sautent sur les eaux
Priant les oiseaux de passage
De leur apprendre, est-ce bien sage
A voler dans le firmament
Pour faire mentir le crabe blanc.