L’orchestre est silencieux
Mais les derniers accords traînent encore leurs hardes
Entre les fauteuils bleus
Et je reste trahi, planté comme une écharde.
Où sont les blonds échos des cuivres et des feux ?
L’orchestre est évanoui
Les grands lustres éteints. Ne rôde en mon regard
Que l’étincelle blanche des femmes de nuit
Appogiatures chair tendues vers un retard
Prophète inéluctable des cadences enfouies .
Je reste avec ma peur
Dans la mémoire en nappe suintant de ces ors
Que matifie la sueur
Des hautbois langoureux, des flûtes et des cors.
J’étais aigu dessein
Et je me propageais en vagues éruptives
Comme l’enfant qui naît découvre cette rive
Et rampe vers le sein.
J’ai peur du trop-obscur
Et me fraye un passage entre les chairs gonflées
De l’espace dilaté
Le moite éblouissant de cette déchirure.
Ma mort est toute proche,
L’origine est assise au royaume des ombres .
J’ai froid comme un symbole oublié aux décombres,
Comme l’encre palie qui sur le blanc s’accroche.
Il ne reste reflet
De ma vie si fugace
Que les sonores traces
Au velours archiviste des fauteuils élimés.
L’orchestre s’est tu.
J’étais le dernier contre-Ut.