A l’approche vertigineuse de la nuit
Le jour s’enveloppe de son linceul
En brouhaha de vacarme orné
Et s’engouffre dans les abîmes
De l’inaccessible éternité
Seul le grincement de la plume sur la papier
Déchire le voile épais du silence
Donnant vie à des mots
Qui se parent de bruit dans l’inexprimé
Qu’une mémoire en devenir
Baptisera à l’eau des vertus de l’oubli.
L’attente se charge d’une plainte
L’appel d’une musique subtile
Une symphonie qui s’érige en lieu
Et d’une certaine majesté
Venue d’ailleurs
Réveille mes sens les plus récalcitrants
Quelque part un mur se fissure
Une pierre se détache
Et glisse dans les eaux glauques de la nuit
Y dessinant des ondes qui s’en vont
A l’assaut du monde des mystères
L’âme vagabonde assoiffée d’absolu
S’accroche à une image flottante qui passe
Parcourue par une pensée désirante
De manque pesant
Et se laisse emporter
A travers les entités immuables des rêves.
Guidé par une émotion nomade
Qui dresse sa tente au gré des incertitudes
J’avance sur cet itinéraire
Peuplé d’ombres et de secrets
Où le silence est l’agent fascinant
Et menaçant à la fois
L’appréhension me précède
L’envoûtement me brouille la vision
Je me sens soudain seul
Face à tant d’anonymat
Pourtant dans un coin de ma conscience
Inaccessible au doute et à la peur
Le désir à aller de l’avant s’attise.
Entre ténèbres et mystères
Dans cet entre-deux que cloisonne
Une intimité séculaire
Résonnent soudain les propos évanescents
D’une présence majestueuse
Un souffle qui passe
Dont on ne peut s’emparer
Poussière d’étoiles empêtrée
Dans les filets du temps
Lumière scintillante
Traversant ses mailles illusoires
Une splendeur mâtinée de tendresse
Une féerie qui s’inscrit dans la réalité
Une beauté qui se donne à contempler
Dans la dénuement le plus complet
Par elle on voit le son comme la couleur
On comprend l’indéfini
Et on entend le muet
Un moment de grâce sans limites
Qui élève au dessus des murs
Qui séparent le sacré du profane
Et va au delà de la lumière
Qui brille en toute chose
Chez les anges comme chez les démons
Et inonde de ses bienfaits
Le palais comme la cabane
Il n’existe plus ni haut ni bas
Ni maître ni esclave
Seulement l’Amour qui étend sa grâce
Sur un monde endormi et oublieux de sa réalité.
Tandis que les ombres familières d’obscurité
commencent à trépasser
Dans la lumière naissante de l’aube
La nuit dénoua sa douce étreinte et s’abandonna
Dans un frou-frou de satin noir étoilé
Au frémissement du temps qui s’écoule
Me léguant un souffle qui murmure à l’oreille
L’écho d’un Rûmi :
"je viens de cette âme
Qui est l’origine de toutes les âmes
Je suis de cette ville
De tous ceux qui sont sans ville
Le chemin de cette ville n’a pas de fin
Va,perds tout ce que tu as
C’est cela qui est le tout."
Je compris soudain
Que tout était sacré et sans fin
Dans l’étreinte de cette belle nuit
Je venais d’embrasser l’éternité.
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L’étreinte de la nuit
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