Assis sur un muret, je regardais la mer,
A côté d’un marin à l’aspect de corsaire,
Un hibiscus gracile occultait le soleil.
L’alizé docile soufflait à mes oreilles,
Des histoires d’îles, de trésors et de fées,
Me poussant doucement dans les bras de Morphée...
Jadis les cocotiers n’étaient pas végétaux.
Ils n’étaient pas arbres, pas plus qu’arbrisseaux.
C’étaient de grands oiseaux, des sortes de hérons.
Echassiers africains, beaux parleurs, fanfarons,
Qui toutes les années, traversaient l’Atlantique,
Puis prenaient près de l’eau, des poses hiératiques.
Ils n’étaient jamais seuls et se groupaient en foule,
Tels dans les basses-cours, les canards et les poules.
Droits sur une patte, lissant leurs plumes vertes
Ils pondaient tout le temps sur les plages désertes,
Des grappes négligées d’œufs aux coques velues.
Surprenant ? Un bébé naît parfois chevelu !
Les cocotiers étaient grands, bêtes et bavards
Et méprisaient l’humain qu’il trouvait trop couard.
Un jour un grand oiseau non loin de Dahomey
Railla une princesse aux jambes entravées
Traînée vers un bateau par deux ou trois forbans,
Puis vola, satisfait, vers le soleil couchant.
Notre oiseau, peu malin, surveillait sa couvée
Au bord de l’océan quand il vit arriver
Les voiles du navire de retour d’Afrique.
Il lança, persifleur, une pique ironique,
Lorsque débarquèrent les hommes aux peaux noires
Leurs femmes, leurs enfants, leur affreux désespoir....
La princesse l’entendit,
D’une phrase le maudit.
« Toi et ta famille, en Guinée, partirez
Quand mon peuple avant vous, sera enfin rentré »
Alors des racines enserrèrent les pieds
Des grands volatiles à jamais prisonniers.
C’est à cet instant que je me suis réveillé....