J’ai le givre entre les mains, comme une pierre affutée glissant sur la page.
Le froid bourdonne dans l’éclosion des lignes et je ne sais plus quoi penser de mes autres naufrages. Avais-je déjà écrit avec des gants de laine quand l’hiver approche avec ses ficelles accrochées aux arbres, comme autant de guirlandes de passage ?
Noël m’a réveillée. Des jouets à offrir, et dans le plus beau des coffres, une lettre splendide, que je n’attendais plus depuis longtemps. Mon espoir…
M’a-t-on oublié ? Ai-je oublié ?
Noël avait un sens quand nous nous empressions de prendre le train. Nous allions nous retrouver à l’autre bout de la France. Les enfants n’étaient pas encore nés.
Dehors, le sable semble dire adieu à l’inconnu qui nous faisait aller de l’avant.
Où sont d’ailleurs passées les dunes de la côte ? Notre paysage est séparé, comme une brisure au-dedans, de tant d’années, de tant de kilomètres à reculons.
J’emmènerai les enfants en bord de mer pour leur montrer ce que nous avons su préserver. Il n’y aura plus de neige sur le parcours, juste de quoi rire entre nous. Nous ferons des bonshommes de sable et écrirons de toutes nos lettres l’idée première d’une fête qui ne nous quittera plus en décembre ou en janvier.
Le cœur battant, nous dirons l’alphabet par les jouets colossaux que Tristan et Iseult adorent, et dans le plus grand secret, nous bâtirons une nouvelle stèle à notre enfance.