Je pleure les forêts, les ruisseaux de la terre,
Les immenses déserts qui s’étendent toujours,
Les vents désespérés au cœur plein de poussière,
Les rivages perdus cernés de vieilles tours.
Je pleure sur les jours sans joie, sans espérance,
Sur les vastes regrets d’un monde disparu,
Sur les étangs bercés de mornes souvenances
Sur le rocher stérile où se rompt la charrue.
Je pleure, Ô mon amie, sur la vie moribonde,
Sur la mort d’un futur qui n’a plus d’avenir,
Sur la fureur immense et la rage qui grondent
Dans un linceul de jours où la vie va finir.
Je pleure sur l’argent comme sur la misère,
Sur le grand criminel que l’on appelle humain,
Sur les jours révolus de notre pauvre terre
Qui enterre à jamais l’espoir d’un lendemain.
Pauvres hommes cherchant des bonheurs illusoires,
Des gaietés frelatés, des joies de rien du tout,
Ô pauvre humanité, fière de peu de gloire,
Où as-tu donc caché ton honneur ? Dans les sous ?
Le veau d’or ancestral, il est toujours vivace,
Il règne sur la vie comme un sombre tyran,
Écartelant nos jours, nos rêves et nos ans
Sur un horrible pal qui étripe nos traces.
Je pleure sur tous ceux qui voudraient bien hurler,
Sur tous ceux qu’on empêche à tous prix de se plaindre,
Qu’on a décervelé sans amour à étreindre,
Ceux qui seraient bavards, mais qu’on a muselés.
Je pleure sur les morts de faim, les morts de guerre,
Sur la chair torturé, les enfants maltraités,
Sur les peuples maudits que l’on a déporté,
Et sur les tous les charniers qui endeuillent la terre.
Je pleure sur ces morts en d’horribles géhennes,
Sur les crimes parfaits d’un monde en agonie
Mais je pleure surtout sur la bêtise humaine
Qui massacre sans fin nos espoirs d’infini...