Les nouvelles n’étaient pas bonnes au sujet de mes effets personnels restés à St Antoine. L’infirmière en chef m’expliqua qu’elle était tombée sur une personne qui ne voulait rien savoir, et qui avait refusé tout net le moindre dialogue. L’infirmière me dit que j’aurais peut-être plus de chance si je téléphonais moi-même. Elle me communiqua donc, le nom et le numéro de téléphone de la personne responsable du service régie, qui conservait les objets de valeurs des patients à St Antoine.
Je tentais donc ma chance, pensant qu’il y avait simplement une méprise et que tout rentrerait dans l’ordre très rapidement. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’eus cette charmante personne en ligne :
Ha ! Non, ça n’est pas possible.
Comment ça, pas possible ?
Il faut venir les chercher vous-même.
Ha ! Non, ça n’est pas possible.
Comment ça, pas possible ?
Je ne peux pas venir les chercher moi-même puisque je suis à l’hôpital. Envoyez-les moi ici.
Et d’abord vous êtes où ?
Foch, à Suresnes.
Qu’est-ce que vous faites là-bas ?
On m’a transféré.
Bien sûr, et comme par hasard dans un hôpital privé !
Figurez-vous, que je n’ai pas choisi. Pour l’instant tout ce que je veux c’est pouvoir récupérer mes affaires.
Fallait les demander avant de partir.
Je l’ai fait, chère Madame, je l’ai fait, et plusieurs fois. On m’a répondu que ça suivrait avec mon dossier médical et que ça ne posait pas de problème.
Ouais, ben c’est pas comme ça que ça marche.
Comment faut-il faire alors ?
Il faut venir les chercher ici.
Je viens de vous dire que j’étais à Foch et que je ne pouvais pas venir.
C’est pas mon problème, fallait pas aller dans le privé.
Ma patience commençait à atteindre ses limites et le ton revêche employé ne me convenait pas du tout. Je tentais malgré tout de faire entendre raison à l’employée du service PUBLIC - ça j’avais bien compris, qu’elle en était restée à cette stérile querelle Privé/Public. - J’avais bien envie de lui dire que public et privé c’était du pareil au même, que dans le public ils étaient eux aussi privés ; privés de tout et dans son cas particulier privée d’intelligence et d’un certain nombre d’autres éléments nécessaires au fonctionnement normal d’un cerveau ; mais je m’abstenais de le faire, me doutant qu’elle était bien incapable de comprendre. J’essayais de lui faire entendre que sans argent, sans carte bleue, sans pass navigo, je me trouvais dans l’incapacité de me rendre à St Antoine pour venir y récupérer mes effets. D’autre part, mes clés se trouvant elles aussi à St Antoine, je ne pouvais pas non plus rentrer chez moi et il fallait bien qu’elle consentît à faire un léger effort de compréhension, sinon le problème ne se règlerait pas tout seul.
La conversation se termina par un raccroché rageur et définitif du combiné téléphonique de la préposée aux objets de valeur qui préféra couper nette la communication. J’en restais muet de stupéfaction devant ce mur d’incompréhension qu’elle dressait devant elle.
J’effectuais malgré cela une nouvelle tentative de conciliation, espérant à tort qu’elle s’assouplirait un tout petit peu. Mon second essai se termina quasiment de la même manière et, pour faire bonne mesure, je glissais un « vieille conne » au moment précis ou elle raccrocha.
Je tentais alors une manœuvre de diversion en demandant à mon épouse d’appeler St Antoine pour résoudre le problème. Ce n’était pas la bonne solution non plus. Et même pire, la préposée, sans doute ivre de son pouvoir, tint des propos très directs à ma femme :
Non mèdèmmme, vous ne pouvez pas venir chercher les affaires de votre mari.
Comment faut-il faire alors ?
Il faut venir les chercher ici.
Mon mari est à Foch, il ne peut pas se déplacer et on ne sait pas quand il doit sortir.
Ça appartient au trésor public, mèdèmmme et si vot’ mari s’en sort pas, ça f’ra partie de la succession. C’est comme ça et pis (de vache) faudra penser à envoyer un avis décès.
La situation devenait Ubuesque, nous étions vraiment en présence d’une authentique abrutie avec qui tout dialogue constructif était impossible. C’est à se demander si elle n’était pas mariée à un syndicaliste de base, tant elle restait sur sa position sans vouloir lâcher prise. Je fis encore une ou deux tentatives qui se terminèrent elles aussi par des échanges de noms d’oiseaux et à ce rythme là, j’allais devenir un spécialiste de la gent ailée en moins de temps qu’il n’en fallut à Hitchcock pour réaliser son célèbre film sur les animaux à plumes. Je commençais à comprendre les chasseurs de bécasse et leur lutte contre la LPO. J’étais à deux doigt de commander en ligne sur www.jesuisunchasseuretjaimelesanimaux.com un deux coups à chevrotines pour farcir de plomb ladite bécasse. Toutefois la voix de la raison se fit entendre et j’optais pour une réclamation en bonne et due forme auprès de la responsable hiérarchique de dame bécasse. Je pus enfin m’expliquer, me faire entendre et deux petits jours plus tard mes effets personnels m’étaient envoyés par la poste directement à l’hôpital Foch, sauf les espèces (10€), que je finis par récupérer quelques semaines plus tard par virement bancaire. Puisque nous en sommes à parler d’argent (j’accepte sans sourciller tous les dons), à St Antoine, si l’on vous demande votre carte vitale et les coordonnées de votre complémentaire santé, n’allez pas croire que c’est pour vous simplifier la vie et se faire payer directement par les organismes sociaux concernés. Non, pas du tout, à St Antoine, on ne vous demande ces renseignements que pour vous faire la conversation et occuper une armée de bureaucrate occupés à creuser le trou de la sécurité sociale. En effet quelques temps après mon retour à la vie civile, je reçus une facture dont le libellé s’apparentait à une note d’hôtel :
Frais de séjours (hospitalisation) 2 jours.
Montant dû 2.500 euros.
Ni plus ni moins, aucun détail concernant ces frais de séjours et ce que cela incluait. De ma plus belle plume et sur les conseils avisés d’une fort aimable personne de la CPAM, je fis un courrier à l’hôpital pour les enjoindre de :
1 - codifier, selon les canons de la nomenclature du code de la santé publique, les actes facturés.
2 - prendre contact avec la sécurité sociale pour se faire payer
3 - aller se faire voir ailleurs.
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et presque fin