Mauvais locataires
L’habitat était tout neuf. Rénové au fil des millénaires et de la disparition des précédents locataires trop rustiques et incapables de l’embellir et de profiter des richesses mises à leur disposition.
Un nouvel habitant est arrivé. L’homme. « Très intéressant » s’est dite la nature. Il semble évoluer et utiliser tous les moyens que je mets à sa disposition.
Il utilise mes formes : collines, grottes, vallées pour s’établir en sécurité.
Il transforme le bois, les roseaux, pour s’outiller afin de cultiver le sol et se nourrir. Mon eau pour, non seulement s’abreuver comme les précédents locataires, mais aussi, pour se laver, arroser les cultures au moyen de moulin.
Le vent pour carguer les voiles afin de pêcher et découvrir de nouveaux territoires.
Certes, il est quelque peu dominateur et son nombre augmente sans cesse. Il lui faut de l’espace, il refuse de se priver de richesses. Un enfant gâté.
« Il est temps » se dit la nature de lui faire connaître un peu la famine, la peste, le choléra afin de réduire un peu son nombre et lui réapprendre la solidarité et l’égalité devant l’adversité.
Hélas, il est mauvais élève et la génération suivante oublie rapidement les leçons. Elle a découvert la science et joue avec pour son confort sans penser aux conséquences sur son habitat. L a grippe espagnole ne résout toujours pas le problème.
C’est désormais l’escalade. Les grands conflits mondiaux ne leur apprennent qu’une chose : ils doivent se protéger en poussant toujours plus loin leurs connaissances scientifiques pour dominer, se protéger, profiter de la vie en multipliant les plaisirs futiles et éphémères.
Il faut du temps, de plus en plus de temps, pour profiter de tout. Mais ce tout, est-il essentiel ? Indispensable ?
L’homme oublie qu’il est né avec deux jambes, l’important est de se déplacer vite, pour ne pas perdre de temps.
Mais la nature a toujours le même rythme !
Un conflit majeur entre le propriétaire et le locataire est inévitable.
Tsunamis, tempêtes, coulées gigantesques de boues, sècheresse, la nature utilise tous les moyens dont elle dispose. Rien n’y fait ! L’homme construit des super-tankers de plus en plus gros, des avions de plus en plus nombreux, bétonne pour s’étaler en mégapoles.
Cancer, sida, etc… rien n’y fait, la science surchauffe ses neurones pour y remédier.
Alors le propriétaire lance sa « bombe nucléaire » : un virus qui fait fi de tout et utilise la tornade de son mode de vie pour obliger l’homme à redevenir un locataire respectueux des vraies valeurs de la vie et de son environnement.
Il réduit le nombre de ses habitants. Cloue les avions au sol. Oblige à retrouver une hygiène respectueuse. Ralentit le rythme et la distance des échanges. Ouvre les yeux sur les relations familiales et sur la futilité de tant de choses.
Deux mois confinés. La nature a respiré. L’homme a été libéré. Il retrouve trop vite ses habitudes. Le virus est toujours aux aguets, il reprend son œuvre.
Les cimetières se remplissent, les effets secondaires sur les survivants leur changent totalement leur vie.
Punition : re-confinés !
Va-t-on retenir la leçon cette fois-ci ou attendons-nous juste le miracle du vaccin pour recommencer ?