Cette nuit là, quand je suis arrivé dans le salon de ce paquebot, l’obscurité s’est levée, délicatement, comme un fondu enchaîné sur un nouveau plan. Timide, je me suis contenté d’observer ces gens affairés aux tâches qui semblaient communes. Il y avait là quelques sourires épanouis qui devisaient tranquillement, d’autres plus grimaçants articulaient des textes d’une belle profondeur.
Pas très loin, un homme discret s’occupait de la lumière et vérifiait notre accoutrement, rapiécé ou richement brodé, peu lui importait, il fallait simplement qu’il fût propre et qu’on ne changea pas d’habit en plein commerce.
Quelques têtes se sont tournées vers moi, reflétant cette lumière que j’avais perçue de loin, et je me suis approché. J’entendais distinctement ce qui se disait sans tout comprendre, le fantasme se mêlait à la réalité la plus sordide, l’amour guidait quelques lèvres et écornait quelques oreilles, certaines analyses rendaient bien compte des histoires que beaucoup avaient partagées, pas forcément ensemble mais qu’ils comprenaient comme une composante nécessaire de leur parcours. Et toujours, les regards intelligents disaient les mots qui manquaient, cernaient au plus près la réalité des choses, habillaient la trivialité des expériences d’un peu de beauté, si bien que tout le monde dans cette ambiance feutrée pensait faire un beau voyage.
Les escales ne manqueraient pas où l’on embarquerait d’autres voyageurs pour qu’ils nous racontent comment ils affrontent les dangers que chacun désignait. Alors, j’ai déposé mes valises dans un coin de la pièce, glissé un petit mot, pour souligner que j’avais entendu quelques belles paroles et j’ai commencé à me réjouir.
Cette croisière me plaisait déjà.
Le nom du bateau aussi : La plume et l’encrier
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