Ca a commencé par des câlins paternels, une tendresse trop œdipienne dans le fond, cachant une libido enterrée depuis des années, couvant un brûlant désir de renaître dans un tout autre monde…
Elle l’appelait Papi et elle l’adorait. Quant à lui, il a commencé d’abord par aimer son regard, la chaleur et la confiance de sa main dans la sienne, son innocence contrastant avec sa maturité prématurée. Puis, un fou s’est réveillé en lui et commença à l’aimer ; à l’aimer, Elle !
Au début, elle se dit :"une passion comme les autres qui va finir par pâlir et partir en fumée". Elle avait une grande blessure de l’amour et était certaine que jamais elle ne pourrait aimer un autre après son lointain César. Mais quelque chose naquit en elle. Elle imaginait ses caresses, ses baisers, son odeur après l’amour, la couleur de sa voix, la sonorité de ses gémissements… Et elle l’aima !
Peut être, les choses ont-elles mal commencé ! Il ne faut jamais semer le vent et ne pas vouloir, ensuite, récolter la tempête ! C’est ce qu’il fit !
Elle, elle trouvait évident voire logique que leur passion virtuelle aboutisse à quelque chose de palpable, de bien chaud, de bien fou. Lui, il savait dès le début qu’il ne lui offrira pas cette fin heureuse mais s’interdisait de le lui dire craignant de la perdre ou de perdre une passion qui le consolait ; car lui aussi, c’était un ancien accidenté de l’amour !
Peut être, ce qu’il y avait entre eux, n’était-ce même pas de l’amour ! Peut être n’était-ce qu’un simple besoin mutuel d’oublier le passé et de fuir l’avenir ! Cependant, il y avait ce désir irrépressible, continuel de sentir l’autre, de garder sa main dans la sienne, de se remémorer ses regards, de lui faire l’amour à travers les ondes invisibles du silence…
Ensuite, soudain, un semblant de projet craignant de se montrer sous la lumière commença à geindre…
Elle savait que ce serait fou de se mettre avec lui...
Lui, c’était un homme stable, bien établi dans ses belles illusions, nullement prêt à rouvrir ses yeux sur les abîmes lumineux de la folie... Elle, c’était une fille qui ne croyait pas à la logique des terminus, qui aimait parcourir la vie et le monde sans jamais s’arrêter puisqu’elle savait que son seul terminus serait la mort et qu’une fois arrivée à bon port, elle descendra sur le quai et proférera son dernier sourire, son plus beau sourire ! Lui, il croyait en Dieu et donc, le craignait ! Elle, elle aimait Dieu et donc y croyait et ne trouvait pas nécessaire de le craindre !
Lui, c’était un homme avec une douzaine de remords en guise de Famille ! Elle, c’était un remords stérile, seul et libre...
Cependant, l’amour trouva un moyen de naître au milieu de cet amas de contradictions. L’amour qui est finalement aveugle et irrationnel...
C’était simple et bien clair, c’était fou aussi : L’amour voulait vivre, voulait voler, voulait s’éterniser... Il ne tenait pas compte qu’il devait mourir à sa naissance. Il s’obstinait à survivre comme seul un batârd dont les parents ne veulent pas sait le faire ! Il a pu survivre et il demandait maintenant à être reconnu !
Il grandissait comme une mauvaise plante grimpante, cet amour ! Il criait à ce qu’on le couve dans un lit conjugual et conforme aux normes !
Cependant, il y avait un hic ! Elle, c’était une fille qui adorait les nuages et la perdition. Lui, c’était un arbre accroché à ses racines et craignant le vent et les orages ! Elle ne voulait pas dormir dans un lit reconnu par tout le monde, elle voulait emmener son homme là-bas, derrière l’horizon et le soleil, sur une planète toute chaude, toute trempée de pluie... Lui, il voulait l’enraciner dans sa terre sèche et froide. Il voulait lui apprendre à respirer là où l’air n’existait pas, là où l’on ne pouvait qu’inventer l’air, la vie, le soleil et y croire !
Elle l’aimait malgré elle. Elle a même pensé à lui obéir ! Mais, un soir de pluie, elle a regardé par la fenêtre, elle a vu la nuit, elle a respiré les étoiles, elle a senti la main de Dieu lui frôler l’épaule... Puis elle a vu son visage dans une glace ; ce visage lui faisait des grimaces, il lui en voulait rien que pour avoir pensé à céder son être à un homme « profane » ! Puis elle a ouvert un livre, un de ses livres, elle a vu les personnages en sortir et crier leur désarroi : « C’est nous tes enfants et nous voulons rester des batârds ! Comment oses-tu nous sacrifier pour un enfant légitime ? ». Puis elle s’est allongée, a fermé les yeux... Le lendemain, elle s’est réveillée, rassurée et triste... Elle a pris un bout de papier, elle a écrit : « Je ne peux pas ! ». Elle a mis le papier dans une belle bouteille de vin et l’a jetée à la mer...
Elle a regardé, ensuite, dans la glace... Son visage lui souriait maintenant !