Marcher dans un long couloir sombre, où les portes alignées sont toutes fermées, d’un côté comme de l’autre, aucune ouverture sur le monde, les embrasures semblent scellées.
A chaque extrémité de ce couloir, une porte aussi, close aussi. Mais ce qui se devine derrière paraît brûlant, tout comme l’enfer qui nous attend. Ces portes-là, il ne faudrait pas qu’elles s’ouvrent.
Arpenter le couloir, avancer et reculer, sans jamais s’approcher de ces portes, celles du fond, qui nous happeraient avec violence, nous emporteraient dans le tourbillon de nos peurs et de nos erreurs, nous réduiraient au silence quand les cris nous mangeraient de l’intérieur.
Avancer pas à pas, sans jamais allez trop loin, en s’arrêtant en chemin, devant une porte, voir si elle s’ouvre d’elle-même ou s’il faudrait la forcer, voir si elle a une poignée, si les gonds peuvent tourner, avec un pincement au cœur de ne pas savoir ce que derrière peut s’y cacher.
Il faut en ouvrir une, au moins une, on est obligé, la choisir est là toute la difficulté car l’on ne peut soupçonner ce que recèle l’autre côté, estimer le destin qui nous attend, le chemin que l’on prend, vers une impasse ou vers la liberté.
Lorsque l’on a ouvert suffisamment de portes et accepté de suivre où elles nous ont conduit, tiré les conclusions et compris ce qu’elles nous ont ordonné de vivre, plein d’humilité et d’humiliation mélangés, le couloir nous appelle et nous y revenons.
Marcher, dans ce long couloir sombre, où les portes alignées sont de nouveau fermées, sur le passé que nous avons rencontré et sur l’avenir où nous n’avons pas voulu aller.
Par chance, par hasard, ou parce qu’on l’a mérité, parce que l’on a été juste dans nos actes et pensées, dans le regard que l’on porte sur nous-mêmes, sur les autres, que l’on a digéré l’existence comme il fallait, parce qu’on l’a accepté, au milieu se trouve une autre porte.
Cette porte-ci n’est pas fermée, il s’agit d’une arcade où l’on est à l’abri, des maux, du vent, des tornades, de la nuit. Au loin on aperçoit une haie taillée et un grand arbre baigné d’un soleil affectueux d’une tiédeur pleine de quiétude. Aucune inquiétude de survient puisqu’on connait cette allée car nous y sommes déjà passé, un jour il y a très longtemps et que l’on sait ce qu’on va y retrouver.
De l’eau qui coule sans fin, de l’herbe verte et tendre, des fleurs écloses et des arbres fruitiers. La paix.