Le soleil brillait de tout son éclat au zénith. Chevauchant les flots d’eau turquoise, deux vaisseaux s’affrontaient avec vigueur. Les vents gémissaient leur rage sur les voiles des navires de combat. Les fumées crachées par les bouches à feu s’envolaient pour s’évanouir dans les alizés. Deux frégates se chassaient, Le Triomphant et Le Téméraire.
Les hommes s’affolaient sur les ponts au rythme de la cadence de tir. Les voiles soumises à des contraintes extrêmes propulsaient les structures de bois au milieu de cet océan de désolation.
Le capitaine à la barre du Triomphant hurlait ses ordres à son équipage péniblement à cause des gueules gémissantes des canons et du sifflement des courants d’air se déversant. Les successions de mouvements pour charger et faire tirer l’artillerie étaient parfaitement rôdées et rapides. Les boulets valsaient au dessus de l’eau, se faufilaient parfois dans la carcasse d’un des bâtiments avec éclats et souvent sifflaient au dessus des têtes des marins.
L’échange de tirs avait assez longtemps duré et les deux frégates entamaient une manœuvre d’abordage. Les hommes prenaient les armes en main, chargeaient les pistolets et préparaient leurs grappins.
Les voiles étaient refermées et les eux navires progressaient lentement l’un vers l’autre. Les deux équipages se cachaient derrière des barricades et attendaient le moment opportun. Les flots portaient les deux engins au même endroit avec patience.
Après une longue attente, les deux bâtiments se retrouvaient face à face, de côté, avec moins d’une dizaine de mètres les séparants. Le vent s’était arrêté depuis une dizaine de minutes et le silence était présent.
Un hurlement vînt rompre cet équilibre. Une fluette fumée s’évada des deux ponts tandis que résonnaient de multiples tirs. Les deux camps s’élançaient l’un sur l’autre avec violence. Des hommes tombaient à la mer en hurlant de douleur et d’autres continuaient de traverser à l’aide des grappins en direction du camp adverse. Les coups de sabre et d’épées commençaient à couvrir celui des armes à feu ponctué de cris de souffrance. Le capitaine du Triomphant sur son pont venait d’arracher un bras avec son sabre mal aiguisé. Il planta son arme dans le visage du blessé pour l’achever et il s’attaqua immédiatement à une nouvelle cible. Les combats furent durs et sans pitiés, comme chaque camp l’avait annoncé via son drapeau au tout début de l’escarmouche.
Le nombre de combattants baissait considérablement et les passerelles étaient jonchées de cadavres mutilés et de blessés estropiés suppliants. Le sang coulait sur les planches et la haine dans les veines des marins.
Le commandant du Téméraire venait d’arriver face au capitaine du Triomphant. L’affrontement global s’arrêta pour laisser place à ce duel final.
Le capitaine, de grande taille, fit quelques pas en avant, le visage fier et la chemise déchirée et rougie. Le commandant resta immobile, le regard bestial. Il portait un foulard noir et d’amples vêtements.
Le duel fut engagé et les échanges furent rapides. Les deux hommes étaient haletants à se frapper au sabre et à contrer. Ils reculaient à tour de rôle mais reprenaient toujours leur place. Les lames se rencontraient à un rythme frénétique. Puis le commandant appuya un peu trop un coup et se retrouva déséquilibré. Son adversaire en profita pour le pousser et lui enfoncer son arme profondément. Aucune riposte possible, il s’effondra sur le sol.
« Coupez ! Bordel, Paul tu es idiot ? Les pirates ça n’a pas de montre Breitling ! On refait la scène ! Vires moi ça tout de suite ! »
L’homme jouant le rôle du capitaine du Triomphant fut surpris et très confus. Les figurants, pour ceux qui étaient encore vivants, semblaient être très mécontents, ne voulaient pas rejouer la scène et des brancardiers venaient enlever les morts et mourants du plateau. Le réalisateur faisait rentrer de nouveaux acteurs, un peu réticents, pour remplacer ceux de perdus dans cette scène.