J’ai vaincu les dragons qui peuplaient mes rêves à l’âge où l’imaginaire et le réel se mêlent en un étrange ballet monstrueux. J’ai triomphé des démons qui se cachaient sous mon lit lorsque la nuit tombait, silencieuse, implacable me glaçant le sang. J’ai méprisé les vampires qui m’observaient dans les ténèbres et dont le regard perçant me poursuivait pendant des heures où n’arrivant pas à trouver le sommeil, je restais tétanisée au fond de mon lit, la couette remontée jusqu’aux yeux. La maison, alors était habitée de créatures effrayantes, et chaque bruit m’affolait.
Et puis, vint une nuit où je décidai d’affronter mes peurs. Je devais avoir sept ans, la grande horloge de la salle venait de sonner minuit. Le pas déterminé, je descendis l’escalier et j’ouvris la porte d’entrée, bien décidée à combattre ces êtres immondes qui hantaient les ténèbres, mais là, à ma grande surprise, je ne vis ni loup garou, ni mort vivant, ni même le moindre fantôme, au contraire je goûtais à la sérénité qu’apporte l’obscurité.
La lune veillait chaleureuse sur le petit monde de la nuit dont je faisais partie. Je sus alors que rien ne pouvait plus m’arriver et je pus enfin apprivoiser le sommeil.
Durant des années, j’oubliai la peur, l’angoisse et longtemps je crus que j’étais sauvée. Mais un jour, il fit irruption dans ma vie alors que je ne m’y attendais plus. De tous les monstres que mon imagination fertile avait pu engendrer, celui-ci était le plus hideux et le plus cruel, malheureusement, il était bien réel.
Il se dressait devant moi de toute sa petitesse, nabot vaniteux et fat. De sa bouche s’écoulait le fiel de ses railleries et de sa malveillance. Il se prenait pour un géant mais n’était en fait qu’un être lâche et cruel, incapable d’assumer jusqu’à ses propres paroles, crapaud inculte et grossier se prenant pour le tigre élégant et raffiné. Il est si facile de blesser celui qui est à terre et de lui enfoncer un poignard dans le cœur mais certains hommes sont ainsi, veules et stupides.
De ce dernier coup porté par la bêtise humaine, je me relèverai, j’en reviendrai grandie prête à reprendre les armes contre la méchanceté gratuite et l’injustice, pestes qui se répandent et envahissent notre monde.