Cardialogue

 Ecoute-moi, je suis ton cœur.
 Mon cœur ? Tu parles ?
 Je ne parle pas, mais tu m’entends
 Bon, eh bien parle, je t’écoute
 J’ai un service à te demander
 Oui ?
 J’aimerais bien m’arrêter de battre deux-trois minutes, j’ai une...
 Eh, oh, ça va pas ? J’ai pas envie de mourir.
 Laisse-moi finir s’il te plaît. J’ai rencontré une fille.
 En voilà une histoire. Une histoire d’amour ? Alors bats, mon vieux, bats. Pourquoi vouloir t’arrêter ?
 C’est que l’affaire se présente mal. Je ne me sens pas prêt, j’ai besoin de me recueillir.
 Et tu ne peux pas faire ça sans t’arrêter, tout comme moi je parle en marchant ? Chez moi, la marche favorise même le recueillement.
 Il me faut entrer en catalepsie, c’est le seul moyen d’ échapper un instant au cycle du temps. Pas de pulsation, temps suspendu, l’espace lui-même perd ses dimensions...
 Attends un peu, Einstein, si tu t’arrêtes, c’est ma vie qui est suspendue...à ton retour. Si tu oubliais de revenir hein ? Ça s’est déjà vu des distractions de ce genre chez les amoureux.
 Oh, le bel égoïste, je travaille pour toi sans anicroche depuis combien d’années ? Je poursuis : dans l’espace distendu qui s’ouvrira devant moi, c’est la porte de l’éternité, le savoir universel, l’Akasha. L’histoire du monde et surtout la mienne, je saurai...
 Je la connais ?
 Quoi encore ? Tu n’arrêtes pas de m’interrompre.
 La fille pour qui tu bats. Je suis intéressé, il me semble. Tu es prêt à me faire faux bond, à mettre ma vie en danger. Elle vaut le coup au moins ?
 Si elle vaut le coup ? J’ai eu le coup de cœur, c’est le cas de le dire. C’est pour ça que je me permets...Alors, c’est d’accord ?
 Ben, attends, faut que je...Hé ?