Près du pont deux enfants jouent, petites filles aux joues rougies par le froid et au regard insouciant. Cheveux blonds et cheveux bruns s’envolent , se rejoignent et se mêlent derrière un ballon blanc et noir. Leurs cris de joie et leurs rires rebondissent sur les murs des maisons qui les entourent et éclatent dans la clarté éphémère d’un petit matin d’avril tranquille et serein.
Au cœur de la ville, le printemps qui s’amorce fait naître des bourgeons aux branches des arbres et les oiseaux s’éveillent à la vie en trilles cristallines pendant que le soleil timide abreuve de ses rayons à peine tièdes les eaux limpides de la Miljacka. Le ciel s’est revêtu d’un bleu translucide et aucun nuage ne vient troubler la quiétude de l’horizon, l’instant est sacré presque irréel.
Huit heures, une cloche sonne au centre de la cité, l’église orthodoxe convie ses fidèles alors qu’à deux cents mètres de là quelques personnes se rassemblent devant la cathédrale éventrée exhibant ses vitraux cassés.
Huit heures, une cloche sonne au centre de la cité, l’église orthodoxe convie ses fidèles alors qu’à deux cents mètres de là quelques personnes se rassemblent devant la cathédrale éventrée exhibant ses vitraux cassés.
Tandis que des femmes se pressent et s’activent au cœur du vieux marché turc, le muezzin appelle à la prière. Quelques couples enlacés s’embrassent tendrement, imperméables à tout ce qui n’est pas leur bonheur. Au seuil des cafés, des hommes debout discutent fermement et fument deux ou trois cigarettes achetées à la sauvette entre deux gorgées de bière blonde.
Huit heures dix, le ballon s’échappe des mains de la petite blonde qui dans un rire s’élance à sa poursuite devançant sa compagne de jeu. Au même moment, une balle traverse le pont et stoppe sa course au milieu du front de l’enfant aux yeux d’ambre qui s’écroule sans un cri.
Dans Sarajevo en ruines, le signal est donné, la trêve vient de s’achever.