C’était dans un village profond niché au cœur de la montagne entre une carrière de lauze et une imposante cascade . Les vieux, qui autrefois fonctionnaient aux volées de cloches de la chapelle située plus haut, occupaient encore les logis abandonnés par la jeunesse partie vers la grande ville. Plus les années s’écoulaient, plus les dos se voûtaient, plus les vestes de velours brun s’élimaient à force de frotter sur les bords des grandes tables de bois attendant que le temps passe.
Lorsque l’hiver figeaient les maisons aux murs de pierres plates et que, dans la neige quelques cheminées fumaient dans le silence glacé, on apercevait parfois une ombre noire, maigre fagot sur le dos, glisser d’une habitation à l’autre. Alors dans l’aphasie totale, une autre cheminée accompagnait ses voisines de fumée.
Un beau matin d’été tandis que le père Tonin se rendait vers la Combe avec sa chèvre, il les vit arriver. Lâchant biquette, il se mit à courir levant les bras et raclant du sabot dans la caillasse.
-Les voilà, les voilà !!
-Qui ça Grand Dieu, qui ça ? s’écrièrent les autres.
-Elles, haleta Tonin, elles ! La Dominique et la Luce !
-Qui ça Grand Dieu, qui ça ? s’écrièrent les autres.
-Elles, haleta Tonin, elles ! La Dominique et la Luce !
N’en croyant pas leurs oreilles, les anciens se mirent aussitôt à trotter vers la sortie du village. Aucun doute, c’était bien elles ! Les quatre fondeurs installèrent la Dominique et la Luce bien en vue sur le point culminant du hameau. Depuis la vie a repris ici, rythmée par les sonnailles. Il paraît qu’il y a même une école !