Plus j’y pense et plus je me dis que ça doit être rudement insupportable. C’est vrai, être seul, c’est n’exister pour personne. C’est se lever le matin, les yeux encore gonflés de sommeil, n’avoir personne à embrasser, personne à qui raconter ses rêves, même les plus fous, personne qui vous sert votre petit-déjeuner au lit, café serré, orange pressée, personne qui vous entoure de ses bras, et vous dit que vous êtes l’unique, tant attendu, tant désiré, tant aimé, personne pour vous frotter le dos sous la douche, préparer votre brosse à dents, vous coiffer les cheveux, tendrement, personne avec qui parler du programme de la journée, des petites et des grandes choses à faire, personne pour choisir avec vous une tenue dans l’armoire, personne pour dire à votre mère de rappeler plus tard quand vous êtes au petit coin, personne qui vous accompagne au travail, vous embrasse langoureusement dans la voiture au coin de la rue et vous regarde jusqu’au bout avant de redémarrer, personne qui vous appelle au moins trois fois dans la matinée pour vous dire des mots tendres, des choses drôles ou qui font du bien, personne pour venir déjeuner avec vous le plus souvent possible, personne qui vous appelle au moins cinq fois dans l’après-midi, personne qui vous attend à la sortie un bouquet de fleurs à la main, personne qui vous écrit des petits mots doux, partout, partout, personne qui vous invite au restaurant le plus souvent possible, personne avec qui rentrer le soir à la maison, la main dans la main, personne qui vous ouvre la porte, vous débarrasse de tout ce qui vous embarrasse, vous embrasse, se fait tendre, un peu plus, personne qui vous prépare le dîner, puis vous mène dans la chambre, tamise la lumière, juste un peu, ouvre délicatement les draps, vous entoure délicieusement de ses bras. Quelqu’un qui sait parler à votre corps, avec les mains d’abord, une main de soie, qui suit les courbes, qui vous tourmente, c’est bon, c’est bon. Personne qui remonte la couverture sur vous pour faire le nid, douillet, personne qui vous baise chastement le front avant de souffler la bougie. Personne avec qui aller au cinéma, courir sur une plage en vacances, cueillir des chanterelles à l’automne finissant, s’asseoir sur un banc pour regarder passer les gens, personne qui vous lit des passages d’un de ses livres préférés, personne qui vous apprend à jouer aux échecs, patiemment, personne qui vous regarde, personne qui vous trouble, personne qui vous touche, personne qui vous étonne, personne qui vous console, personne qui vous admire, personne qui vous encourage,
personne qui vous gâte, personne qui vous désire, tout le temps, personne qui vous aime,
personne qui vous souhaite votre anniversaire comme ça... C’est d’un triste !
Non franchement, je ne comprends pas comment font les gens seuls. J’avoue que pour moi, c’est un mystère. Rien que d’y penser ça me fait froid dans le dos. Ça doit être insupportable. C’est vrai, la vie à deux, c’est tellement mieux. A deux, on se tient chaud, on se serre les coudes, on est toujours plus fort pour affronter la vie.
On fait quantité de choses ensemble, c’est extraordinaire. A vrai dire, je ne changerais de vie pour rien au monde.
Alors, dis-moi, qu’est-ce que je vais devenir si tu pars ?