Pour rendre à Brel ce qui appartient à Hergé, outre mes idées personnelles, que je partage bien volontiers avec "moi" et que revendique dès lors personnellement haut et fort (ben tiens, je vais me gêner !), je me suis également inspiré d’informations glanées de-ci de-là sur le web en particulier les sites suivants :
http://www.eurobru.com/defaut.htm et de http://cours.funoc.be/essentiel/article/article.php?idart=337&id_result=175-25
http://tracedemoi.typepad.com/tracedemoi/2006/03/comment_compren_3.html
Je prends le risque de vous choquer ? Allez, oui, au diable la couardise et vive la fanfaronnade.
Vous choquer parce que ce qui suit s’adresse aux franco-terrosistes de France et je sais pertinemment bien qu’il y en a peu sur "la plume" qui est un lieu particulièrement ouvert au monde (ce n’est pas de la vile flatterie, c’est l’opinion que je me suis forgée en vous lisant).
Alors voilà, sachez que je suis ravi, positivement enchanté, que depuis quelques années "la France" (ton solennel, avec au loin deux églises qui teintent de tous leurs airains, à Colombey), ravi donc que "La Frrraaance" ai pu prendre de la distance avec les blagues belges, suisses, canadiennes... et autres pays francophones et profondément francophiles... (mais pas ‘phages’ depuis que les bons pères ont expliqué aux cannibales que, décidément non, ce n’est pas gentil-gentil de bouffer son voisin...avec les doigts qui plus est !)
Lourd, je vous assure, très très lourd cet humour douteux renforçant l’image du français hautain et "dikkenek" (c’est à dire, prétentieux et vantard... Une nuance, il apparaît, vu de nos frontières, que ce caractère condescendant se propage essentiellement à Paris)
Je ne suis pas assez intégré dans votre monde, dans "La Frrraaance", pour en être certain, mais je peux imaginer que les blagues volent également bas entre les ch’tis du Nord, les Marseillais, les Franc-comtois, les Bretons et autres ‘Etceteras’ ... Mais qu’importe puisqu’il s’agit de rappeler l’importance du respect et de la tolérance (ici également, n’est-ce pas Eric..)
Anecdote :
Cela se passe dans un café (un estaminet ou un caberdouche comme on dit chez nous) le français demande à son voisin de bar : "Pardon, Monsieur, vous êtes belge ?") et l’autre de répondre "oui, pourquoi ?". "Connaissez-vous la différence entre un belge et un miroir ?" "Non, pourquoi ?" dit-il d’une voix que l’on sent très ‘contenue’. "Ah, dit le français (parisien sans doute)ben le miroir il réfléchit..." Le voisin de répondre (je vous passe la description du regard interloqué, des poings qui se serrent, de la bave rageuse qui dégouline des babines...) "j’imagine que chez vous cela fait rire, mais tant qu’on en est à blaguer, connaissez-vous, vous, la différence entre un français et un miroir ?". Notre cousin : "heu, non, j’avoue, je ne vois pas..." et bien dit votre cousin : "le miroir il est poli..."
Voilà qui résume un certain agacement..., voire même un agacement certain...
Saviez-vous que jusqu’il y a peu la Belgique comprenait le plus grand nombre de Prix Nobel par tête de pipe ? Alors, avant de nous traiter de bêtas...
Un débat actuel : sachez que nous n’avons strictement rien à fiche que Johnny soit belge ou pas... Gardez-le ! (je n’ai rien contre l’interprète et certainement rien pour les beaux textes de ses auteurs (en particuliers ceux de JJ Goldman et de M Berger).
Mais laissez-nous les vrais de vrais. A en croire certains de vos compatriotes (et j’en suis conscient, bien peu représentatifs de "La Fraaance") des tas d’artistes, chanteurs, écrivains,..., sont français, dès lors qu’ils ont du succès.
Ben oui, que voulez-vous, la Belgique, vu son Histoire, est prêteuse, ou, mieux, internationale... (nous fûmes celtes, nerviens, ménapiens, ..., gaulois, romains, francs, hollandais, espagnols, français, ..., nous avons récupéré notre identité (nos identités devrais-je dire) le 4 octobre 1830 au moment de la révolution) (si intérêt, voir, par exemple le site suivant : http://www.europa-planet.com/belgique/histoire.htm)
A titre d’exemple, Jacques Brel, vous connaissez, j’imagine...hihi... à en croire certains de vos compatriotes (à Paris en particulier, Paris-France et non Paris-Texas ;-D..) Jacques Brel est le plus Français des Belges (à en croire ce Parisien qui fait "sien" ce qui l’arrange...) pour nous il reste le plus Belge des Belges chantant (avec bon nombre d’autres) en français, au temps où Bruxelles Brusselait. Mêlant dans ses chansons, des expressions ou belgicismes, voire même du flamand.
Il en est de même chez Hergé qui distille des tas de "private jokes belges" dans ses "petits mickeys" en créant de nouvelles langues, en particulier le Syldave au départ du néerlandais ou d’expressions Bruxelloises. 1 exemple : dans tintin et le sceptre d’Ottocar (autobus), la devise de Syldavie Eih bennek, eih blavek", , vient du néerlandais : "Hier ben ik, hier blijf ik" (littéralement "ici, je suis, ici, je reste" autrement dit : j’y suis j’y reste.
Savez-vous, une fois, que le célèbre "une fois" tant exploité par vos humoristes vient également d’une expression flamande qui a été traduite littéralement : au lieu de dire "viens un peu voir" (en flamand ‘kom maar eens zien’) on dit : "viens une fois voir". A noter que le "une fois" se retrouve rarement en fin de sentence..
Le Brusselerr (rouler les ‘R’ et appuyer les ‘SSS’ de manière sssuave, prononcez Brusssselaire) est la langue populaire de Bruxelles (prononcez brusssellle et non bruk’sselles) un mélange de français et de flamand brabançon. Comme en France, nous avons plein d’accents différents selon la région, vos imitations sont souvent inexactes et malhabiles, non qu’il s’agisse exclusivement de l’incapacité que vous avez à reproduire l’inimitable prononciation ‘à la flamande’ de ces mots, mais elles s’avèrent souvent inaptes à transposer l’esprit grivois et toute l’autodérision, la drôlerie, de l’âme ‘belche’...
Les puristes considèrent les Belgicismes comme des erreurs de français et nous avons été élevés comme cela, conditionnés ou formatés devrais-je dire, je suis capable d’identifier et de corriger les "belgicismes" dans mes textes.... ..mais pourquoi faire dès lors que notre français, mais également celui de Suisse, du Québec, d’Acadie, de Louisiane, d’Afrique est souvent plus proche du "vrai" français, originel, celui de ses racines, et bien plus imagé que le "nouveau français" de l’Académie (encore que depuis quelques années certains mots belges (cf. ballotin) entrent dans le dictionnaire de l’Académie française)
Pour illustrer le côté imagé de notre langue (et parfois surréaliste) : manger un croustillon (beignet ; accent tonique sur le ’C’ (K) et rouler les ’R’), c’est, Krrroquer à pleines dents la vie et inviter toute la foire du midi sous sa langue. La kermesse (que l’on trouve aussi au nord de la France) est plus ‘rabelaisienne’ ou -mieux- ‘Breughelienne’, polissonne et égrillarde que la fête populaire.
On y achète des boules, des couques, des chiques, plus sucrées et rondes en bouche que de banales friandises (bonbons, viennoiseries et gomme à mâcher).
Et puis d’où vous vient cette idée folle des soixante ou des quatre-vingt dix ? Septante, octante, nonante sont les termes étymologiques et je les trouve bien plus pratiques à utiliser.
Notre ‘langue’ est colorée et drôle, nos mots peignent littéralement les objets et les choses. La drache (également au Nord de la France), prononcer drrrrache en faisant rouler le ’r’, la drache donc, communément appelée ‘drache nationale’, arrose plus qu’une forte pluie, on l’entend déjà battre et rrrouler sous un ciel qui grrronde.
Se servir ‘un klouch de sauce’, une cuillère de sauce, on entend littéralement celle-ci s’écraser sur le stoemp-chicon dans l’assiette. (stoemp le ‘oe’ se prononce ‘ou’, purée aux légumes ici à l’endive)
Si vous entrez dans un caberdouche (café populaire), vous y dégusterez une bonne kriek (cerise en flamand, bière à la cerise) avec une tartine au platekees (prononcez +/- platttekéés = fromage blanc, littéralement fromage ‘plat’... imagé, non ?).
Foutre une ‘rammelink’ (appuyez sur les ‘mmm’ prononcez l’ink à l’anglaise) n’est-ce pas plus ‘roulant’ que mettre une baffe ?
On dira d’une personne chétive et malingre que c’est un "déserteur van t’kerkhof", un déserteur du cimetière (en flamand dans le texte) qui peut alors nier le côté imagé de ’notre’ français ? (mais également celui du monde : ayant tendance à avoir du ventre = du bide ou, comme on dit chez nous "un durillon de comptoir", un de mes amis au Burkina, pointant du doigt mon ventre m’a dit : "ollala, toi t’en as un gros cimetière à poulets..." j’adore ! ).
Bref, le belgicisme c’est tof (chouette). "Alors, stop aux carabistouilles des puristes. Qu’ils ne viennent pas mettre le brol au vogelpik dans notre langue. Ils n’ont pas de quoi faire de leur nez"*...
Parce que l’avantage qu’on a, nous les francophones du monde, c’est qu’à force de regarder vos télés, on vous comprend alors que l’inverse n’est pas toujours vrai...
*Autrement dit, une fois, dans la langue de Voltaire : "Stop aux bêtises des puristes. Qu’ils ne viennent pas mettre le désordre au hasard dans notre langue. Ils n’ont pas de quoi se vanter."
(vogelpick, prononcez le "gue" = littéralement oiseau-pique = jeu de fléchette, en référence aux plumes et à la pointe)
Ne nous en voulez pas, chers cousins, d’en avoir un peu marre du chauvinisme et de l’égocentrisme culturel français (oui, essentiellement parisien)
Nous revendiquons notre propre francophilie ! Stop à "l’impérialisme académique", à cette manière de rendre l’espace francophone monolithique ou centrifuge, voire colonialiste...
Eh oui, faut vous faire une raison, il existe un français hors de France et le belge, le suisse, le canadien, l’acadien, sont souvent les gardiens de la mémoire du français ‘original’
Mais qu’importe en définitive et vive la différence dès lors que l’on se comprend, et que l’on se ressemble, que l’on se rassemble dans cet amour de la langue...
Alors, Brel et Proust, même combat ?
N’aiment-ils pas tous les deux ‘Madeleine’ ?
...et je pourrais associer à ce combat la singularité des régions de France et l’ensemble des francophones, rien que dans la chanson "française" il y a tant de merveilleux textes et poètes de par le vaste monde.
Avant goût :
"Een pluim, een inkpot et on est ‘stevooï’, même si on sait pas de chemin avec, t’en fait pas, on tirera bien son plan en cours de route..."
= Une plume, un encrier et on y va, même si on est à court d’idées, t’inquiètes, on se débrouillera chemin faisant.. (prononciation = "stévoye" pas "voie" mais oïe comme dans Tolstoï)
"Potferdek ! (difficilement transcriptibe, juron du genre : non d’un chien !)
Marieke (ie = long îî, petite Marie), que fais-tu là, une fois, j’en suis tout ‘paf’ (imagé, non ? = j’en suis moi-même baba). Je ne comprends plus rien de rien, ne serais-je qu’un saisi (un sot) ou un gros snul (idem) ?
Avec ton père qui nous regarde sous le dessous de ses yeux plissés (la répétition est admise pour souligner la scène ou lui donner un caractère absurde, autre spécialité belge avec le surréalisme), j’ai envie de me faufiler en stoemelings (en douce) pour aller me foutre une bonne douffe (cuite) chez Rogéke (le petit Roger) dans son estaminet (café) de la place du jeu de balle (prononcez ’jeu d’balll’). J’ai le cerveau qui se raccrabouille (racrapote) faut que je réfléchisse à ce qu’on peut faire, pas envie de tout sketter entre nous moi (casser).. là j’avoue je suis complet dans la pape (prononcez papppe = bouillie), ché plus ouske j’en suis..."
Sondage : dois-je faire une traduction simultanée ou différée du texte, en ajoutant un lexique en fin ? Au risque alors de vous obliger à interrompre votre lecture pour ‘farfouiller’, une fois ou deux-trois, dans le ‘dictionnaire franco-belge’...?
Et pour terminer en beauté, voici un texte de Julos Beaucarne (poète/chanteur Wallon) :
"On parle français au Québec à Rebecq à Flobecq à Tahiti à Haïti au Burundi au Togo
au Congo à Bamako à Madagascar à Dakar en Côte d’Ivoire en Haute Volta à Brazza
au Rwanda en Guyane à la Guadeloupe au Sénégal à la Martinique à Saint-Pierre et Miquelon
au Gabon en Nouvelle Calédonie en Tunisie au Liban dans les Nouvelles Hébrides
dans l’île de la Désirade dans l’île de la Marie Galante dans l’île Maurice au Cameroun
en France à Gérompont-Petit-Rosières à Sorrines-la-Longue à Tourinnes-la-Grosse
à Jandrain-Jandrenouille.
On parle français à Pondichéry dans les Indes en Louisiane à Matagne dans les Fagnes,
les indiens algonquins de l’État de New York parlent français et les gros ventres du Montana également.
Nous sommes en tout 180 millions de francophones dans le monde*
Voilà pourquoi nous sommes fiers d’être wallons"
Ndla : on pourrait terminer en remplaçant ‘wallon’ par tous les précités....
* = sans doute plus encore le texte fût écrit par Julos en ’74.