Un homme se promenait seul dans le jardin du monde, soudain, il vit un pommier aux branches ployant sous les fruits. Il s’approcha curieux et gourmand. Une pomme, plus rouge que les autres, à la peau lisse et brillante étalait ses rondeurs alléchantes. Sous le soleil, sa couleur se déployait et semblait s’écrier : « regardez comme je suis belle, complimentez-moi ». Elle se pavanait, tentatrice et aguicheuse, se faisant remarquer.
Alors le passant, pauvre naïf pitoyable s’extasia, tendit la main vers le fruit, en caressa un instant l’épiderme flatteur puis croqua à pleines dents dans les courbes ensorceleuses. Mais ce n’est qu’à cet instant que la traîtresse se montra sous son vrai jour, laissant apparaître une chair pourrie brunâtre et véreuse recrachée instantanément par l’ingénu dans une moue de répulsion.
Et pourtant, le mal était fait, il en gardera le goût écœurant et répugnant pendant de si longues heures qu’il en perdra l’envie de mordre encore aux fruits qui s’offriront à lui.
S’il avait été sage, il aurait pu écarter quelques feuilles et y aurait trouvé des pommes aux formes et couleurs moins caressantes mais dont la pulpe succulente l’aurait fait fondre de plaisir.
Mais l’homme n’est qu’un sot ne se fiant qu’aux apparences, il ignore ce qu’il perd et ne sait ce qu’il gagne. Et comme disait George Sand : « La beauté de l’apparence est seulement un charme de l’instant ; l’apparence n’est jamais le reflet de l’âme. »