Voyageur du temps venu des profondeurs d’un ailleurs improbable passez les portes de fer forgé ouvertes devant vous.
Avancez, dans la lumière de l’intérieur.
Ressentez sa chaleur au plus profond de vous.
Entendez les vagues de l’océan se briser sur les blocs du radeau de pierre transportant le temple du voyage.
Respirez à pleins poumons l’air iodé.
En des temps anciens, les humains savaient écouter la nature, décrypter les messages des cieux, lire les constellations, accepter les mystères de l’impalpable, non comme une fatalité mais comme un guide vers un autre monde.
Ils réunirent toutes leurs connaissances, leurs savoir-faire, leurs croyances, en un seul lieu, tout en haut d’une colline au milieu de la mer déchaînée.
A chaque pleine lune, lorsque les étoiles dans le ciel sombre de la nuit dessinent une géométrie parfaite, un homme entre dans le temple et part à la découverte d’autres réalités.
Il parcourt diverses époques. Chacune d’entre elles lui laissent un souvenir différent sous la forme d’un objet déposé sur une caisse en bois.
Une écharpe satinée beige foncée, posée comme une invitation à la saisir délicatement pour la porter à son nez, respirer le parfum de la dame qui l’a porté, se souvenir de ce moment merveilleux passé en sa compagnie, du plaisir dans ses yeux lorsque vous lui avez apporté ces quelques fleurs tendrement abandonnées dans le nœud du foulard.
Une lampe à pétrole dont la flamme brûle éternellement, a éclairé votre soirée dans ce chalet de montagne au milieu de nulle part. L’odeur des bûches se consumant dans la cheminée s’empare de votre odorat, le crépitement des étincelles vous emporte à nouveau dans la valse des flammèches. La chaleur du plaid sur vos jambes, le roman que vous teniez à la main sont autant de sensations que le livre de vos souvenirs se remémore pour vous.
Une tête de femme délicatement recouverte d’un fin voile transparent tente de cacher la larme qui ourle ses cils. Est-ce un regret ou ce sentiment de bonheur si profond qu’il émeut ?
Dans le fond, l’aube se lève.
A droite, un nuage rosé indique que la construction va rejoindre le royaume des rêves.
Au réveil, il ne subsistera que la sensation de l’étrange, de l’irréel vécu...