Le sang coulera ce soir.
Dans cet entrepôt sordide isolé près du vieux port désaffecté, cathédrale crasseuse et improvisée par des hommes au visage masqué, l’autel a été dressé au milieu des flammes et des bâtons d’encens.
Les adorateurs sont venus nombreux ce soir assister à la cérémonie, Satan a guidé leurs pas déterminés vers l’endroit profane où l’innocence et la pureté seront cette nuit crucifiées.
Vêtus comme l’étaient autrefois les sombres inquisiteurs, de longues robes noires et de cagoules pointues, ils attendent récitant à voix haute une prière étrange, venue d’un autre âge et leurs voix se répondant en échos rebondissant de parois en parois se mêlent et créent une musique sourde et effrayante.
Mais soudain, tous se taisent, le silence envahit le sanctuaire quand paraît le grand maître habillé de rouge sang. Un symbole curieux orne sa poitrine et sa main est armée d’une dague effilée dont le manche ouvragé est orné d’or et de rubis.
Il s’approche de la table de sacrifice où est allongé un enfant recouvert d’une toge blanche et dont la chevelure blonde s’empourpre par instant au gré de la lumière des cierges l’entourant. Il ne semble pas effrayé, drogué sans nul doute, son regard semble hypnotisé par les gestes de son bourreau.
Celui-ci lève les bras vers le ciel, murmurant une litanie obscure mélange de latin et d’une langue satanique puis d’un geste brutal et subit plante son couteau dans le cœur du petit sacrifié qui dans un cri bref et terrible offre son âme au diable.
Alors d’un pas lourd et traînant, les adorateurs défilent devant l’horreur récitant à nouveau leur monstrueuse prière.
Dans quelques heures, ils s’endormiront le cœur léger oubliant leur folie et reprendront leur vie et leurs occupations quotidiennes comme si le sang n’avait jamais coulé. Demain, nous les croiseront peut-être et nous leur sourirons sans nous douter un seul instant de la noirceur de leur âme...