Eloïse, que dis-je… Yvette Corneille, arriva au château de la comtesse Khommange. Elle se présenta à cette dernière à midi tapante, histoire de ne pas faire mentir le nom de code de sa mission et réprima un bâillement, comme quoi son nouveau patronyme commençait à lui coller à la peau.
Pendant que la comtesse chiffonnée décryptait derrière une paire de lorgnon la lettre d’introduction, Eloïse laissa vagabonder son regard dans le grand vestibule aux murs couverts de portraits de famille. Son esprit vif ne manqua pas de remarquer que tous les aïeuls de la comtesse s’étaient fait représenter accompagnés de leur chien, reproductions conformes de la petite chienne disparue. Tous, sauf un, personnage à la mine sombre, voire sinistre.
La comtesse qui, ayant terminé sa lecture, constatait qu’Yvette Corneille ne lui prêtait pas attention, toussota.
Eloïse s’excusa de cet instant d’inattention en s’esclaffant sur le caractère attendrissant des petits toutous et sur la constance de la présence de cette race dans la prestigieuse lignée de la comtesse.
Oh ! Il en manque un.
Mon arrière Grand Oncle Léopold, pièce rapportée, un infâme… Il ne supportait pas les chiens. Il possédait un chat aussi laid que lui… Mais, nous nous égarons. Vous êtes ici pour remplacer mon chauffeur. Vos références me semblent parfaites et Firmin mon Majordome va vous montrer la voiture, votre chambre et vous donner les consignes.
Eloïse emboita le pas à Firmin, non sans avoir au préalable salué la Comtesse comme il se doit.
Sous son air posé, froid, quelque peu hautain Firmin semblait soucieux. Eloïse, dont le flair ne pouvait mentir, sentait une tension. Le personnage lui parut tout de suite suspect et tirant discrètement de la petite poche de son sac à main un stylo et un petit calepin, elle nota : « Firmin = Suspect »
Eloïse sentait l’excitation la gagner. L’enquête progressait à grands pas même si, paradoxalement, elle avançait, elle, à petits pas, gênée dans sa démarche par les chaussures à talon qu’elle avait enfilées pour la circonstance.
Si, la Delahaye 135 Chapron Cabriolet avait fort belle allure, il n’en était pas de même de la chambre située dans les combles.
On y accédait par un vieil escalier métallique en colimaçon qui partait du vestiaire, située derrière le garage.
La petite pièce, éclairée par une lucarne dont la vitre crasseuse ne laissait passer que peu de lumière. Face au lit peu engageant une armoire à l’aspect branlant. Une vieille commode surmontée d’un lavabo et un bidet complétaient le mobilier.
Le majordome prit congé après avoir dicté les consignes. Petit déjeuner servi dans la cuisine du château à six heures trente. Voiture prête à démarrer, dans un état impeccable, devant le perron du château à huit heures. La Comtesse ne tolèrerait aucun retard.
Eloïse avait également à charge de réaliser quelques courses, dans le village. Sa journée se terminant le soir à vingt et une heure.
Eloïse se demanda s’il y avait un syndicat des chauffeurs de voiture de maître histoire de faire un peu le foin dans ce instances, son enquête une fois terminée.
Ce premier soir, vers vingt deux heures trente, Eloïse enfila sa combinaison « Cat Woman » et entreprit une petite ballade nocturne, une visite non organisée du château. Par chance il n’y avait aucun chien dans la propriété, l’unique compagne à quatre pattes de la comtesse ayant été enlevée. Le système d’alarme était obsolète, Eloïse l’avait remarqué en pénétrant dans le vestibule.
(A suivre...)