Jeans crasseux, mains rentrées, il avançait en rasant les murs… Sa seule préoccupation : ne pas se faire remarquer, surtout avec les poches pleines de pognon. Il tenait le rouleau dans sa main gauche, serrée à sans faire péter les jointures. Mais il ne ressentait plus la douleur, le manque occultait tout.
Cela faisait plusieurs jours qu’il n’avait pas mangé, trop occupé à multiplier les billets verts… Et pour ça, il n’avait pas hésité à fracasser de la grand-mère, mais bon pas de remord pour lui, là où elles iraient bientôt, elles n’en auraient plus besoin de toutes façons.
Ce soir, il avait rendez-vous avec la Faucheuse, son dealer favori. Celui-ci devait son surnom à son accoutrement, une robe de bure noire sous laquelle il planquait tout un tas de surins savamment aiguisés… On ne sait jamais.
Il s’approcha lentement de la forme sombre, silencieuse, tendant sa liasse d’une main tremblante… aussitôt remplacée par trois jolies seringues prêtes à consommer.
Il s’isola dans une ruelle sombre, excité, puis défit les bandages de son bras gauche… Le trou sur son poignet était net, propre, comme les trois autres sur son corps… Il portait ces stigmates depuis l’adolescence, une marque du destin ? A vrai dire il s’en foutait… En tout cas pour un camé comme lui, c’était bien pratique, surtout pour y planter son clou à venin…
Il s’allongea sur le sol jonché de détritus et appuya lentement sur le piston.
Les bras en croix, en plein sur la vague, Jésus se sentit enfin ressusciter.