Je ne connaissais le métro que de nom. Je ne l’avais jamais pris.
N’étant rarement venue à Paris et toujours accompagnée, je ne
voyais du métro qu’un monstre aux mille bouches qui nous avale d’un
coup sans qu’on puisse dire ouf ! Deux mois, que je crevais de
trouille. Ah ! Je n’aurais pas du écouter ce que m’en disaient
mes copines et mes enfants. De quoi avoir peur. Le faisaient-ils
exprès ? Là j’étais au pied du mur , il me fallait le prendre.
Impossible de me dérober. J’ai promis de descendre dans le
midi. Je descendrai si le métro ne me
bouffe pas. Et s’il me bouffe, on viendra bien me
rechercher. Pas idiote la fille, hein ! j’ai prévenu tout le
monde... on ne sait jamais.
Nous y voilà, le train vient de s’arrêter en gare St Lazare.
Saint-Lazare ? Il... il est temps pour moi de descendre dans le
métro.
La voix- Bon, tu y vas oui ? Je suis pressée.
Moi - Tiens, tu es là ? Qu’est ce tu fais tu ici
La voix - Au cas où tu ne le saurais pas, je fais
partie de toi, tu es obligée de me supporter.
Moi - Eh oui ! Malheureusement.
La voix - Alors, tu avances ? On a encore un train à prendre.
Moi à un marchand de journaux - Excusez moi Monsieur, pour le métro,
je vais où ?
Le marchand - Vous sortez de la gare et c’est tout de suite devant
vous.
Moi - Merci beaucoup.
La Voix - Eh bien dis donc on n’ est pas
arrivés à cette allure.
Moi - Tu m’ennuies, tais toi un peu que je me concentre
La voix -Toi te concentrer ? Laisse moi rire.
Moi - Chut ! je vais acheter des tickets, ne me fais pas
remarquer.
Quelques minutes plus tard
La voix - Je dois reconnaître que tu as assuré le coup sur les
tickets. Un instant j’ai cru que tu étais une pro.
Moi - Chut ! On va nous entendre
La voix - toi, oui ! moi non ! on ne m’entend
pas. Je voyage incognito
Moi - Tu veux me faire honte ? Tu veux me faire passer pour une
schizo ?
La voix ( ironique) - Ah bon ? Tu ne l’es pas ?
Moi - Aux dernières nouvelles, non !
La voix -Tiens il y a une barrière
Moi - J’ai vu. Je vais mettre mon ticket. Ah ! Mince ça ne fonctionne
pas. Mon ticket je
l’ai pourtant bien enfilé dans la fente !
La voix ( moqueuse) - Quand je pense que tu avais peur de ne pas
pouvoir sortir... tu ne parviens même pas à entrer. Ah ! Ah ! Ah !
Moi - Toi, tu la fermes un peu. Tiens ! il y a du monde ,
je vais demander
La passante mal commode - Vous mettez le ticket. Vous
recupérerez le ticket plus loin et vous pousserez la barrière.
Moi - Merci beaucoup Madame
La voix - Je ne voudrais pas te vexer mais elle te prend pour une
demeurée.
Moi - Je sais. Mais ce n’est pas grave, je suis entrée,
C’est le principal. Bon, alors ! La ligne quatorze ?
La voix - Devant toi ! C’est pas écrit assez gros ?
Ah oui ! C’est vrai t’es pas réveillée.
Heureusement que tu ne t’es pas levée à trois heures du mat... Sinon,
bonjour les dégâts
Moi impatiente - tu as fini oui !
J’en ai marre de t’entendre
La voix - Okay, je me tais. De toute façon cela ne me plait pas ici.
Les murs sont gris. Les gens sont tristes et désincarnés.
Moi - oui, il n’y a que les gens aux valises, comme moi
qui ont le sourire. Tiens, la machine infernale
arrive. Vite que j’entre avant que les portes se referment. J’ai trop
peur
La voix - De quoi ?
Moi - Je ne sais pas. De rester sur le quai
mais de me faire
agresser peut-être ?
Je suis restée tout près des portes comme si j’avais peur de
m’éloigner de la sortie, les yeux fixés sur les stations. Je n’avais
que trois stations entreSaint-Lazare et
Gare de Lyon.
Pas mal pour un début : Madeleine, Pyramides,
Chatelet. Sept minutes... les plus longues de ma vie. Enfin ! après
ces sept minutes de terreur, les portes se sont ouvertes. Je me
suis ruée vers la sortie.
Ouf ! Je m’en suis sortie vivante. Eh ! Tu m’entends ?
je m’en suis sortie vivante !...
Ne me demande pas ce qu’il y avait comme publicité,
je ne les ai pas vues. Les odeurs, quelles
odeurs ? Je n’ai rien senti. Retourner dans
le métro ? Pourquoi pas ! si cela me permet de
voyager. Et voyager ? Ah oui,alors !
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