Les rangements font de la poussière. Les souvenirs aussi. Aujourd’hui, devant moi, je viens de retrouver, au fond d’un carton, une photo de mariage de ma fille. Et pour moi, des souvenirs oubliés reviennent à la surface.
On dit souvent qu’il n’y a pas plus beau moment, pour un couple, que la célébration des noces en présence de toute la famille. Ils sont tous réunis en ce beau jour pour (normalement) unir une jeune femme et un jeune homme dans l’église du village. Un jour à marquer d’une pierre blanche dit-on. On le dit encore.
Le mariage est, dans les faits, toujours un moment "idéal" pour réunir enfin les membres des familles. Des familles qui sont souvent dispersées et bousculées par des rendez-vous de travail, à l’école, chez le coiffeur ou dans une association. Toujours des excuses, des prétextes pour ne pas venir, investir dans une nouvelle garde-robe. Cela peut-être aussi un lieu de rencontre pour pouvoir trouver son futur flirt ou (enfin) l’amour de sa vie.
Et pourtant, il en a fallut des querelles, des compromis, des conciliations et un peu d’eau dans son vin pour faire accepter ce mariage ...
Nous, les Durand, parents de la mariée, avions encore accepté de financer le nouveau mariage, le troisième de suite, de notre chère fille chérie. En espérant, un large sourire aux lèvres sur la photo, que ce mariage serait le dernier ... Et notre banquier aussi !
Bien-sûr, tout le monde était content, tout le monde souriait. De la même façon, Madame Martin, la mère du marié, avait trouvé la future belle-fille trop maigre, trop "blonde" et surtout pas assez bien pour son fils unique.
Heureusement que nous étions fachés avec mon frère, mon oncle, la grand-mère, mes cousins et neveux : ça faisait beaucoup moins de monde à inviter. Sans compter que l’on avait du, moi et ma femme, faire un régime pour pouvoir rentrer de nouveau dans nos costumes et robes que l’on avait réussi à acheter en solde.
Nous ne voulions pas, nous les Durand, voir les choses en noir. Mais bon, le destin était contre nous. Notre fille aurait du réfléchir à deux fois mais on ne pouvait pas tout lui demander ...
Elle avait choisi, cette fois-là, de se marier avec le fils Martin, un peu trop jeune, trop ringard et surtout pas assez riche ... Sans parler de sa mère, la concierge du village, dans sa robe toute mitée, qui devait être heureuse de se payer un bon repas à l’oeil !
Il y avait un bon côté des choses dans ce mariage. Notre fille avait enfin réussi à quitter la maison, et cela nous avait fait des vacances. Il faisait beau ce jour-là, tout allait bien et le banquier ne m’avait pas rappelé. Le sourire aux lèvres, nous voulions croire, moi et ma femme, que dans quelques années, ces moments pénibles seraient oubliés et que nous garderions, grâce à cette photo, le souvenir d’un beau mariage ...
Moralité : certains souvenirs sont comme des photos au fond d’un carton. Bien à leur place.