Il attendait sous la pluie en dehors de la verrière, là, sur ce quai de gare. Bien sur il aurait pu se mettre à l’abri devant les guichets, mais elle avait dit :
Je vous attendrai au quai de la gare !
Alors ce matin, il avait prit la voiture et fait les cinquante kilomètres qui le séparaient de la grande ville. Pendant le trajet il avait gardé le sourire et se remémorait tous les échanges de courrier, puis les deux ou trois appels téléphoniques mais surtout le dernier lorsqu’ils s’étaient déclarés leur flamme. C’est elle qui avait décidé de l’endroit du premier rendez-vous, elle lui avait promis d’être là à neuf heures précise.
Elle avait d’ailleurs rajouté :
Soyez à l’heure ! Je porterai une jupe noire et un corsage blanc, un petit chapeau avec une voilette et je déposerai sur ma poitrine la broche que vous m’avez offerte.
Certes il était arrivé un peu en retard, mais après tout, les trains ne sont jamais à l’heure, avait-il pensé.
Quand la motrice rouge et jaune de la micheline aborda son dernier virage au loin et qu’il l’aperçut, son cœur ne put s’empêcher de battre la chamade. Dans un crissement de métal sur le rail, le train venait de s’immobiliser.
Alors ses yeux se mirent à chercher et à dévisager toutes les passagères. Mais elle n’était pas là !
Il attendit ainsi le suivant, puis le troisième, mais elle, elle qu’il aimait tant déjà, n’était pas au rendez-vous !
L’homme transi de froid et d’humidité abandonna tristement la fleur qu’il serrait dans les mains sur le sol mouillé. Elle ne viendra plus !
Sa silhouette noire s’éloigna du quai et se perdit dans les rues luisantes de la petite ville.
A l’intérieur d’un petit café, juste à côté du terminus, une jeune femme en jupe noire, chemisier blanc et chapeau à voilette venait de régler son dernier chocolat chaud. Sur l’enseigne du café on pouvait lire :
AU QUAI DE LA GARE