Six heures : le réveil hurle à me briser les tympans. Je le hais profondément ce matin encore plus que les autres matins. Mal au crâne, bouche pâteuse...mais qu’est ce qui m’arrive, sûrement cet horrible cocktail hier...mais pourquoi ai-je accepté ce second verre, moi qui ne supporte pas l’alcool ?
Je me traîne jusqu’à la salle de bains et dans le miroir...horreur, je pousse un cri...je vois le reflet d’un homme. Je me retourne il n’est plus là...je frissonne de peur, certainement un pychochose...Il paraît qu’ils sont très intelligents, il va me massacrer, je l’imagine déjà se ruer sur moi, un couteau à la main et éclabousser de mon sang le carrelage des murs.
Mes mains tremblent, l’angoisse noue ma gorge mais je ne peux pas rester comme ça sans rien faire, il faut que je le trouve.
D’un geste brusque, je soulève le rideau de douche...personne, je me penche sous le lavabo...rien non plus. Je regarde partout...personne, il n’y a personne...j’ai du rêver éveillée !
Nerveuse, je tourne les yeux vers cette maudite glace et là, ô stupéfaction, il est encore là...il semble aussi effaré que moi. Je garde mon calme et je l’observe. Les cheveux hirsutes, une barbe de deux jours et un affreux pyjama rayé, je tends la main vers lui, il tend aussi la main vers moi. Je recule brutalement le bras en étouffant un cri, il fait de même.
Je m’apprête à tendre de nouveau la main, mais je me rends compte qu’elle ne m’appartient pas, mes doigts sont légèrement velus et cet horrible pyjama est le mien...
Ce type là dans le miroir c’est moi.
Je n’en reviens pas,hier encore j’étais une femme.Que s’est-il passé ? Mais qu’est ce qu’ils ont mis dans ce fichu cocktail ? Quel cauchemar !
Interloquée, je regagne ma chambre, sur le sol des vêtements épars jonchent la moquette : une chemise bleue, un pantalon gris clair, une cravate sombre et un caleçon à petites fleurs...Où sont passés mes vêtements, ceux que je portais hier ?
J’ouvre un grand placard dont j’extrais, hagarde, un jean et un sweat et décide d’aller prendre l’air pour me remettre la tête à l’endroit. Je suis convaincue que lorsque je reviendrai tout sera redevenu normal.
Je passe le pas de la porte et sur le palier, un type me dévisage étrangement. Moi aussi je le fixe et avant que j’ai eu le temps de dire quoi que ce soit il m’interpelle : « Alors Raymond, ben t’en fais une tête, il faut dire que tu en tenais une bonne hier soir !! »
Soudain, un doute m’assaille...