A pas feutré, j’avance dans ton bureau ; tu es là, concentré sur ton travail ; tu ne vois rien, n’entends rien, je suis discrète et tu me tournes le dos.
Sans bruit, je m’assois sur une chaise, la seule libre, les autres servant d’étagères à des dossiers, des boîtes de rangement, des feuilles de papier, des partitions de musique.
Tu es courbé sur ce beau bureau ancien, à tiroirs et tu écris.
Le silence est pesant, la pièce claire, illuminée de ce soleil que nous aimons tant, fenêtres ouvertes sur l’eau.
Tu écris, tu écris… Des mots, des phrases, des notes, des musiques, des tonnes d’airs variés.
C’est ta vie.
Je te vois de dos ; tes cheveux d’argent bouclés sont encore humides de notre baignade matinale et le chien dort à tes pieds.
Je me délecte à te regarder, sans que tu le saches. J’aperçois ta main et la plume dessine des blanches, des rondes, des croches liées entre elles ; je sais que dans ta tête, tu chantes ce que tu écris.
Et je sais aussi que lorsque tu auras terminé ta partition, tu viendras la jouer sur le piano et tu me diras : « Ecoute, qu’en penses-tu ? »
Et le cœur plein de ce bonheur de t’écouter, je te dirai tout ce qui me passe par la tête, je te confierai toutes les émotions qui envahiront alors mon cœur et mon corps, je te demanderai de rejouer, pour m’imprégner de cette nouvelle musique.
Et nous discuterons longtemps de ce nouveau chef d’œuvre ; puis tu retourneras dans ton bureau pour apporter des corrections et des améliorations qui t’emmèneront dans la nuit.
La nuit t’enveloppera, te prendra, telle une maîtresse musicienne.
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