Epilogue.
La radio gazouille, elle vient juste d’annoncer les températures prévues, presque estivales, seize degrés le matin et vingt-deux l’après midi.
Petit déjeuner copieux, une fois n’est pas coutume, un œil distrait à la feuille de chou de la veille qu’il n’a pas pris le temps de lire. Il termine de se préparer. Ce matin il va écrire, il est bourré d’idées, un roman à terminer. Son roman ! Il attaque la troisième page.
On sonne !
On a sonné et on insiste, il y a quelque chose d’obscène dans ce carillon qui vient le tirer de ses rêveries. Qui cela peut-il bien être ? Il n’attend personne.
Ne te dérange pas chéri, je vais ouvrir.
Jacques a lâché sa tasse. Gros plan sur la chute, le café qui danse comme s’il voulait retarder l’inexorable. Bruit de vaisselle qui se brise sur le carrelage, éclaboussure sur le pantalon de jogging, saut en arrière pour éviter le pire, pieds sauvés de justesse.
Ben alors Jacques, qu’est-ce qu’il t’arrive.
Carole vient de faire son entrée dans la cuisine, Jérôme l’accompagne.
Jacques les regarde avec des yeux comme des soucoupes.
Mais ça ne s’arrêtera donc jamais, les personnages ne peuvent-ils donc rester à leur place.
Jacques je pars avec Jérôme.
Aucun problème !
Jacques, tu m’as comprise… Je te quitte.
C’est moi l’auteur…
Oui, ça c’est sûr, c’est toi l’auteur de cette situation, de cette ambiance délétère…
Jacques fonce dans son bureau, il lit son dernier texte, celui qu’il a écrit hier soir avec deux ou trois verres dans le nez. Bon, c’est vrai, il ne l’a pas arrangée, un peu sévère… Un peu bourré sans doute. Mais de là à la voir débarquer dans sa vie à lui… C’est un comble !
Jacques j’ai changé d’avis. Je reste, c’est toi qui pars.
Jacques bidouille sur son ordinateur. C’est décidé, il va effacer tout ce qu’il a écrit. Cela n’est plus supportable.
Ma chère Carole, mon cher Jérôme. Que vous vous en alliez ensemble, je n’y vois que des avantages, surtout si vous ne revenez jamais. Quand j’écris, c’est pour me détendre, pour me décongestionner l’esprit. Bien sûr, vous ne pouvez comprendre. Mais ce qui est certain c’est que je n’écris pas pour que mes personnages viennent me pourrir la vie. Alors toute ces nouvelles, je vais les effacer.
Jacques, tu ne devrais pas faire ça.
Je vais me gêner.
Où est-il passé ?
Qui ça ?
Jacques !
Qui est Jacques ?