Un scénario à la con, comme tous ceux que l’on lui a présenté, elle n’a jamais aimé le cinéma. Gisèle n’a de passion que pour le théâtre mais il faut bien manger entre deux pièces. Elle se fait vieille, les contrats se font de plus en plus rares alors s’il ne lui reste que le cinéma pour exister encore, il faut tourner, tourner encore et qu’importe le film. Celui ci lui donnera un peu de souffle pour continuer à vivoter dans ce monde insensible et froid. Elle pourrait partir mais où ? Et quand à se jeter dans la Seine trop peu pour elle, elle est trop froussarde pour ça et pourtant dans ce film,c’est sa dernière scène.
Pourquoi faire un flash-back sur son passé ? Gisèle n’en a pas ou elle l’a oublié.Quelques bouts de vies lui arrivent bien dans la tête mais est-ce bien la sienne ? Pourquoi tourner encore et encore en scènes courtes ses drames ? Gisèle n’a pas envie de pleurer sur un monde imaginé que par elle et pour elle. Seule, elle l’a toujours été. Elle n’a absolument pas envie de faire chialer une salle remplie de mères de famille à la larme facile. Elle veut, tel un clown faire rire aux éclats les enfants, seulement, il n’y a plus d’enfants, ils ont disparu sans savoir pourquoi. Il ne reste que des adultes avides de sensations et eux ne rient pas... Elle non plus.
Les rushs ont plu au metteur en scène, tant mieux Gisèle les a tous détestés, tout comme son image d’une grande déglinguée,paumée, lugubre et noire dans un univers de rouges, de jaunes, de marron de l’automne. Elle c’est l’hiver en blanc et noir comme le voile qui tombe sur des morceaux d’existence triste et vide. Il voulait un film sobre, il l’a eu mais elle, qu’a t-elle gagné dans tout ça ? Rien,Gisèle se voit avançant, un pied devant l’autre devant la caméra, la tête droite mais ne la regardant pas. Elle n’a aucun moment joué avec l’objectif, si l’autre l’a fait c’est sans son autorisation et parce-qu’ il le désirait. Gisèle n’a demandé qu’à manger même au bord de la Seine où elle s’est jetée la tête la première pour ne plus rien regarder.Tu verras a dit le metteur en scène à Gisèle, tu seras reconnue grâce à mon film. Gisèle s’en moque, elle fuit loin, très loin de ce qui n’est que pourriture.