Nous sommes une douzaine de filles à écrire dans l’atelier d’écriture du quartier. Dans les douze, il y en en cinq ou six à présenter des signes de dopage intensif.
Cela ne paraît pas au début. On commence doucement ... On prend un crayon, une feuille et on écrit. Vous allez dire que c’est facile, que tout le monde peut le faire. Moi, je vous certifie que non. On a eu des garçons qui ont essayé mais ils sont partis. Est-ce la peur des filles ou le fait qu’il n’aient rien à dire ? Je ne sais pas.
Dans notre groupe, il y a une bonne ambiance. Personne ne s’occupe de regarder, les fautes, la syntaxe... Nous ne sommes pas à l’école. Tout le travail téchnique se passe après et non pendant nos séances. Le principal dans l’écriture est de dire sur papier ce que l’on ressent ; à partir d’une phrase, d’une photo ou d’un objet. Ce n’est pas toujours facile de laisser libre court aux sentiments. Quelques unes d’entre nous avons beaucoup subi dans la vie. Pour certaines, les sentiments, les ressentis étaient tus depuis longtemps... Personne ne nous écoutait. Nous étions des moins que rien, des oubliées de la route du savoir... Nous n’avions pas le niveau ou la capacité de le faire.
Dans l’atelier, nous sommes bien, tout le monde est à l’écoute. Les encouragements et les félicitations pleuvent. Chacune regarde l’écrit de l’autre comme un chef-d-œuvre qu’il est. Grâce à l’écriture chacune peut prendre un peu confiance en elle. Il y en a même qui éditent des textes. Vous me direz que c’est du jamais vu. Nous ne sommes pas écrivains et que seuls ceux là, peuvent faire de beaux livres. Je vous détrompe complêtement. Je sais que cela existe aussi pour les écrivaillons que nous sommes et nous sommes fières d’avoir trempé un jour notre plume dans l’encrier. Nous sommes fières d’exister et de vous montrer ce que l’on peut faire. Nous sommes fières de nous droguer ainsi aux mots. Nous avons formé le groupe des siphonnées de l’écriture. Personne ne pourra plus nous dire que nous sommes des nulles. Nous avons notre place dans la société et nous la prendrons.
Aujourd’hui nous arrivons sur la plume grâce à Bernard qui nous reçoit si gentiment et nous l’en remercions.
Nous avons pas toutes de l’aisance face à l’écriture, loin de là malheureusement nous demandons humblement à tous nos lecteurs d’être tolérants devant nos difficultés.
Nous vous remercions tous et toutes de nous lire et faisons la route ensemble ...
Marie-Noëlle, Marie Chantal, Manuéla, Véronique, Anne-Marie et les autres... (Les siphonnées de l’écriture )